Juin 2023 - Mot du Supérieur

Source: District de Suisse

Chers fidèles de Suisse,

Le sujet dont je souhaite vous entretenir pourrait paraître quelque peu prématuré, car parler des vacances en début du mois de juin, c’est anticiper de plusieurs semaines une période de l’année, certes bien agréable, et cela pourrait nous distraire trop tôt du sérieux de nos activités présentes. Cependant, comme le début du mois de juin est souvent le moment des ultimes décisions touchant la planification de l’été, permettez-moi de m’arrêter quelques instants sur ce sujet important qu’il serait bien dommage de prendre à la légère !

Comme souvent pour ce type de sujets, les considérations que nous faisons sont en fait des réflexions de fond, des grands principes, que chacun doit ensuite appliquer prudemment à sa situation personnelle ou à ceux qui lui sont confiés. Les activités comme les destinations de vacances pourront varier de l’un à l’autre, être judicieuses pour ceux-ci, mais nuisibles pour ceux-là, c’est une question de prudence, évidemment ! Mais cette décision, qui réclame un choix prudent de notre part, ne doit pas perdre de vue les influences de ces quelques jours dans notre vie.

Que sont en fait les vacances ? Il s’agit tout simplement d’un changement d’activité, d’un temps de repos, de récréation. C’est une respiration bienvenue, un remède devenu nécessaire en raison de la vie trépidante que nous impose le monde moderne. C’est un problème finalement récent, car le mode de vie d’il y a un siècle ou deux ne réclamait pas ce temps d’arrêt. Nos ancêtres vivaient dans un équilibre rythmé par une nature saine, mais l’intensité de notre mode de vie et le stress qui en découle ont fait des vacances un besoin.

Reste la question de ce que nous entendons concrètement par le mot vacances, car c’est bien le problème ! A observer autour de nous, les vacances sont devenues pour beaucoup une fin en soi, le moment de profiter d’une liberté absolue. Autant d’attitudes qui ne correspondent pas à une vision chrétienne, c’est évident. Mais il est non moins évident que nous subissons forcément nous aussi l’influence de cette vision des choses qui n’est autre que l’esprit du monde, si attirant par sa facilité.

Aussi le premier point qu’il nous faut souligner pour que nos vacances soient bonnes, c’est la présence accordée à Dieu dans ces jours de détente. On a parfois l’impression que la première entrave dont on veut se libérer c’est la loi de Dieu pour se sentir libre, libre et maître de son temps. Pourtant les vacances ne vont pas nous libérer de Dieu ! Pas plus qu’elles nous dispensent de respirer, les vacances ne vont en rien amoindrir notre dépendance totale de Dieu. Nous restons sous son regard paternel, même en vacances. Il serait donc bien nécessaire que nous prenions davantage conscience de notre relation à Dieu pour que cela nous fasse changer de vie.

Une question très pratique à ce sujet, et qui revient fréquemment, c’est la messe dominicale. Faut-il choisir un magnifique lieu de vacances pour constater ensuite qu’il n’y a aucune messe à proximité et manquer ainsi la messe un ou deux dimanches d’affilée… ou se dire que la Fraternité, étant bien répandue à travers le monde, il sera aisé de trouver un lieu de vacances proche d’un centre de messe ? La réponse va de soi ! Il peut évidemment y avoir des exceptions, mais alors on se tournera vers le prêtre pour lui demander conseil. Planifions nos vacances en fonction de nos devoirs religieux !

Les vacances nous libèrent des heures de travail et pourtant, bien souvent, un constat se pose : on n’a pas eu plus de temps pour la prière ! Notre réflexion nous conduit donc au temps que nous offrons à Dieu. Bien sûr que nos vacances ne seront pas entièrement consacrées à la prière, même si l’on ne peut que conseiller ce que beaucoup de fidèles font, du reste : prendre une semaine sur notre temps libre pour participer à des Exercices spirituels, si bienfaisants. Mais il nous faut réapprendre à donner du temps à Dieu, gratuitement. Au cours de nos activités, nous devons souvent réduire considérablement le temps que nous consacrons à Dieu. Nous avons rarement l’occasion de venir à la messe en semaine, et lire un livre de spiritualité nous demande souvent des semaines ou des mois. Les vacances seront alors le lieu idéal pour ne pas bâcler les choses, pour prendre le temps de bien les faire, pour donner à Dieu plus de temps… et c’est loin d’être désagréable !

Après Dieu, ne manquons pas non plus de penser à notre prochain. Là aussi les vacances seront une excellente occasion pour savoir où nous en sommes dans la charité fraternelle. Et cette charité bien ordonnée commencera dans la famille, se portera vers nos proches. Notre mode de vie, souvent effréné, nous empêche de voir tant d’évidences qui sont là sous nos yeux : un enfant qui aimerait que papa joue avec lui, une épouse qui attend de pouvoir se retrouver paisiblement avec son époux, des parents que l’on peut visiter autrement qu’en coup de vent, une grand-mère grabataire à qui l’on peut consacrer plus que dix minutes. Là encore sachons offrir de notre temps, il y a plus de joie à donner qu’à recevoir !

Dans ce domaine, ceux qui pour qui les vacances vont exercer une influence considérable, ce sont les enfants. On connaît bien l’adage : l’oisiveté est la mère de tous les vices. Par conséquent, il me paraît important de plaider pour le bienfait des camps de vacances qui permettent à l’enfant une expérience hors du cadre familial et lui font prendre conscience de ce que ses parents réalisent pour lui. C’est aussi une ouverture courte mais salutaire sur la vie en société. Les camps organisés par la Fraternité sont vraiment une excellente école de vie et on est agréablement surpris devoir combien ces quelques jours peuvent influer sur tout le reste de l’année.

Pour prendre la tranche d’âge supérieur, celle des adolescents et des jeunes adultes, un point essentiel pour le développement de leur personnalité chrétienne sera de donner de leur temps, sans forcément compter, ni vouloir y trouver son avantage. S’il est bon de ne pas rester oisif, mais d’être bien occupé, il est tout aussi important de ne pas organiser ses vacances uniquement en fonction de son intérêt propre. On est parfois impressionné devant l’agenda de ministres que certains jeunes se sont faits pour leur été. A cet âge, il est capital d’apprendre la disponibilité gratuite. Si la formation en vue d’une vie professionnelle est bonne, il serait dommageable qu’elle occupe toute la place. La jeunesse est l’époque des grands idéaux. Il faut apprendre ce don de soi qui peut, du reste, commencer tout simplement par l’aide à une chapelle, à un camp, par une activité en mission.

Enfin, les vacances sont un moment où nous devons prendre du temps pour nous. Non pas de manière égoïste, mais de façon intelligente. Comme nous vivons dans un monde qui a perdu ses repères et qui, d’une manière ou d’une autre exerce son influence dans nos vies, il faudra penser que les vacances sont le moment idéal pour restaurer nos forces. Il faudra alors fuir ce monde d’apparence et éviter le piège d’un certain snobisme de la destination, d’une recherche de sensationnel, d’apparat, d’adrénaline !

Pour cela, n’oublions pas de rester simples. La simplicité ne signifie pas le manque d’intérêt, ni le défaut d’aventure. Elle consiste simplement à mettre chaque chose à sa place. On ne part pas en vacances pour impressionner les autres, ni pour épater par ses albums ou trôner sur les réseaux sociaux avec des clichés paradisiaques.

On prend au contraire des vacances pour, pendant quelques jours, redevenir soi-même, prendre des forces et du courage, devenir un meilleur chrétien, un père ou une mère de famille passionnés par leur devoir d’état, des jeunes motivés et prêts à se donner, des enfants peu à peu conscients des réalités et du combat du monde qui les attend demain déjà. Si les vacances pouvaient permettre cela, quel excellent travail elles auraient réalisé !

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