Juillet 2024 - Mot du supérieur

Source: District de Suisse

Saint François de Sales a cette phrase très belle mais aussi très surprenante : « Une demi-heure de méditation est essentielle, sauf quand on est très occupé. Alors une heure est nécessaire. » C’est une belle citation qui nous fait forcément réfléchir quelque peu. Le problème est que nos réflexions nous portent souvent à nous rassurer : comme la plupart des saints, saint François de Sales exagère un peu et il ne faut trop nous inquiéter, nous qui sommes déjà tant sollicités par notre devoir d’état et qui sommes des catholiques fervents ! 

Pourtant, cette pensée de l’évêque de Genève est tout sauf une exagération. Il est même probable que, s’il avait vécu à notre époque et connu nôtre milieu de vie, saint François de Sales aurait encore doublé la mise. Mais, même si nous étions persuadés de cette nécessité, il manquerait chez nous probablement la compréhension et le courage de la mettre en pratique. La prière nous semble un peu le mot magique qui donne la solution à tous les maux, mais sans que nous en soyons intimement persuadés : et c’est précisément ce point qu’il faut changer !

La nécessité de nous ressourcer pour durer est bien compréhensible sur le plan naturel. Plus un sportif est sollicité, plus il a besoin de périodes de récupération. Plus un artiste ou un compositeur produit, plus il a besoin de source d’inspiration. Le surplus d’activité sature l’esprit et fatigue le corps !

Il serait alors bien illusoire de penser que la vie de notre âme connaisse une logique différente. Saint François de Sales l’a vraiment bien dit : plus nous sommes occupés, plus nous avons besoin de laisser notre âme se ressourcer. L’objection bien compréhensible qui surgit … c’est que l’on n’a pas le temps. Mais avant d’évoquer ce problème bien concret, il est déjà intéressant de s’interroger sur le pourquoi de la nécessité de passer tant de temps pour Dieu. Car si cela nous paraît vraiment important, nous serons d’autant plus enclins à trouver des solutions. Comme le dit l’adage : qui veut la fin, veut les moyens.

Ainsi, la personne très occupée décrite par saint François de Sales, c’est bien nous ! Le monde qui nous entoure, notre milieu professionnel, notre cercle d’amis… tout ce milieu semble vivre très bien sans Dieu et loin de lui. Il n’y a même pas forcément d’hostilité au catholicisme, mais pour le moins une indifférence. Et cette indifférence est contagieuse, elle peut conduire à une remise en question d’un point, puis d’un autre. Elle amène à relativiser telle ou telle exigence de la vie chrétienne. Et une progression lente, mais funeste du mal conduit à tout remettre en cause. Si nos familles et nos jeunes sont atteints des maux de notre temps, c’est probablement là que le glissement a pu se produire.

De là vient la nécessité du temps donné à Dieu, afin de remettre nos idées et nos principes à leur juste place. Qu’il est facile malheureusement, dans l’agitation de notre monde, de perdre la tête ! Au contraire, combien ces quelques minutes passées avec Dieu nous aident à nous ressaisir, à retrouver courage et à persévérer face aux tentations !

Et tout ce temps n’est pas perdu ! Car Dieu est passionnant si l’on prend juste la peine de s’attacher à lui. Au-delà même de la question du temps à notre disposition, soyons bien intimement persuadés de ceci : qui prie sauve son âme ; qui ne prie pas… la perd !

Reste la question du temps à consacrer à la prière et de la raison pour laquelle saint François insiste pour prier plus, alors que l’on est déjà très occupé. Pour bien le saisir, prenons une simple comparaison du quotidien. Lorsque l’on cherche de l’aide, il est souvent bien inutile de demander à celui qui n’a guère d’occupations de nous prêter main forte. En revanche, celui qui est surchargé, trouvera bien souvent le moyen de nous aider ! Quel en est le secret : tout simplement la hiérarchie des occupations. Dans la multiplicité, on est forcé de réfléchir pour s’organiser et mettre les priorités.

De même, plus nous sommes occupés et pris, plus la prière nous aidera à hiérarchiser notre vie et à l’ordonner. En considérant les choses en face de Dieu, nous voyons beaucoup mieux comment organiser notre temps pour le devoir d’état, la prière, le repos et la détente. Mais nous prenons aussi conscience du temps perdu, en particulier avec les nouvelles technologies. Un petit exercice pratique laissé à votre initiative pourra être utile : comparez le temps passé tous les jours sur le smartphone ou l’ordinateur avec votre temps de prière quotidien !

Comment faire alors concrètement pour prendre ce temps pour Dieu ? En tout premier lieu, si l’on veut vraiment progresser, il faut comprendre que la prière est un temps donné à Dieu gratuitement et exclusivement. C’est un rendez-vous, quelques minutes en tête-à-tête avec notre Sauveur. Même relativement réduits, ces moments de méditation ou de lecture méditée sont primordiaux. Si vraiment on souhaite faire quelque chose de sérieux, il faut passer par là et en y réfléchissant, on trouvera certainement du temps.

Le temps consacré à Dieu, ce sont aussi les prières du chrétien qui jalonnent notre journée : le simple fait de débuter et de terminer, comme d’interrompre nos journées pour Dieu, c’est bien marquer qu’il en est le centre. Mais on ne saurait assez recommander ces petits retours vers Dieu que sont les prières jaculatoires. Lui offrir notre travail, nos joies, nos peines, lui demander des grâces, le remercier, penser simplement à lui : tout cela manifeste que notre foi n’est pas artificielle, mais qu’elle est notre vraie vie. La prière devient alors comme une seconde nature et c’est ce qu’il faut souhaiter pour notre âme.

Evidemment que ce n’est pas facile de mettre en pratique tout cela dans notre vie, mais si nous en sommes persuadés et que nous le désirons, le Bon Dieu nous donnera la grâce d’y accéder peu à peu ! Comme nous sommes au temps des vacances, là où nous avons le moins d’excuses de ne pas l’essayer, faisons-le avec générosité ! Notre bonheur en sera la récompense.

Et si nous sommes découragés ou hésitants devant l’ouvrage, n’hésitons pas à faire une retraite spirituelle. C’est vraiment impressionnant de voir comment l’essentiel revient au centre de notre vie en à peine cinq jours passés dans le silence et la prière. Si les prêtres et les religieux ont besoin chaque année d’une semaine de retraite, que dirait saint François de Sales pour ceux qui sont bien occupés !

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