Avril 2024 - Mot du supérieur

Source: District de Suisse

Bien chers fidèles,

La vie de nos paroisses est une richesse indéniable que le bon Dieu nous a donnée pour permettre à notre vie spirituelle de croître et de s’épanouir. Notre qualité d’êtres sociaux fait que nous avons besoin de la vie en société, ce qui se vérifie aussi quand nous parlons des réalités surnaturelles. Comme le disait déjà Aristote, pour vivre seul, il faut être une bête ou un dieu… En effet, pour la plupart des êtres humains, la vie en société est bien nécessaire.

Cette vie paroissiale est donc une vie sociale avec toutes les caractéristiques qui lui sont inhérentes, c’est-à-dire avec ses joies et ses peines, ses grâces comme ses croix. Les membres sont de tout âge, de tous les milieux et de toutes les conditions, unis par la seule réalité qui peut vraiment transcender tous les désirs de la nature humaine : l’amour de Dieu !

Etonnamment, ce ne sont pas les différences apparentes, physiques ou morales, qui sautent aux yeux dans une vie paroissiale. Pour un observateur quelque peu attentif un point ressort tout particulièrement : la différence entre les « anciens » et les « nouveaux ». On ne parle pas d’âge, mais tout simplement du temps passé à fréquenter la paroisse ou plus précisément de l’adhésion à la foi catholique.

Sans prétendre faire une analyse profonde et scientifique, ces deux groupes se manifestent par deux qualités bien distinctes : on remarque la persévérance des « anciens » et on admire l’enthousiasme des « nouveaux ».

La persévérance des « anciens », c’est cette foi à toute épreuve, une foi chevillée au corps. Certes, rien n’est définitif en ce monde, mais autant que la faiblesse humaine permet de le savoir, rien ne semble pouvoir modifier la conduite de ces personnes ou de ces familles profondément catholiques. On voit là l’apport indéniable et si précieux d’une véritable éducation catholique.

Cependant, si les épreuves de la vie n’ont pas éloigné ces personnes de Dieu, elles les ont tout de même affectées, ce qui est bien compréhensible. Les déceptions, les trahisons… tout cela touche forcément, et on se construit peu à peu une carapace pour résister. Ajoutez à cela que le temps qui passe a le malheur de rendre ordinaires les choses les plus extraordinaires, alors forcément… on devient un peu blasé, on s’habitue. On va à la messe, on communie, on se confesse, comme d’habitude, dimanche après dimanche, année après année.

Mais à côté des « anciens », il y a aussi les nouveaux convertis. Ces personnes qui viennent parfois d’une paroisse de village où la foi s’est tellement délitée qu’ils étaient perdus, mais aussi des convertis d’autres religions, voire des athées… Tous ont en commun d’avoir été touchés par la grâce et il faudrait être insensible pour ne pas percevoir la joie communicative qui les anime parce qu’ils ont trouvé ce qu’ils ont cherché si longtemps.

Un enthousiasme à première vue surprenant quand on considère la vie que ces personnes ont pu mener avant leur conversion et la distance qui les séparait de la foi catholique. Mais elles ont découvert dans cette paroisse ce qu’elles cherchaient et en effet, tout leur convient. Elles y trouvent en même temps l’harmonie à laquelle elles aspiraient et la réponse à toutes leurs questions. Ces nouveaux arrivés sont d’une générosité sans limite et prêts à tout pour être de bons chrétiens.

Mais voilà ! ces deux groupes de fidèles, qu’il est bien maladroit de catégoriser, se retrouvent ensemble dans la même paroisse, unis dans la charité du Christ. Une question se pose dès lors : comment peut-il y avoir une telle différence entre ces fidèles ? En toute logique une foi aussi exigeante que la foi chrétienne devrait demander beaucoup de temps pour enthousiasmer. Et à l’inverse, la foi reçue au baptême, nourrie de la liturgie et des enseignements de l’Eglise devrait produire un enthousiasme sans cesse grandissant !

Nous touchons là au mystère de la grâce et de la liberté. La grâce peut mouvoir les âmes sans limite aucune, mais la liberté humaine peut y mettre un frein, des réticences, nous avons tant de peine à nous élever ! Alors, que pouvons-nous faire pour conserver intactes ces qualités et nous prémunir des défauts ?

Il me semble qu’il faut encourager les nouveaux convertis à garder autant que possible cet enthousiasme qui est le leur ! Qu’ils s’attachent à l’essentiel, aux principes solides de la foi, mais surtout pas à l’accidentel, à une recherche trop sensible de grâces. Comme le dit si bien saint Bernard, qu’ils s’attachent au Dieu des consolations et non pas aux consolations de Dieu, car ces grâces passagères ne sont pas le but, mais un simple moyen d’aller à Dieu.

Quant aux fidèles de toujours, il faut les encourager à renouveler leur émerveillement devant les « mirabilia Dei », les merveilles que Dieu nous donne, sa grâce qui passe et repasse ! Admirer le mystère de la messe, le privilège d’une communion, la folie d’amour d’un Dieu qui nous pardonne. Savoir scruter l’action de Dieu en toutes choses, voir le rayon de soleil de la gloire divine traverser et éclairer toutes les créatures, jusque dans leur bassesse et leur petitesse. Que d’occasions de nous enthousiasmer !

Il est intéressant de remarquer que ce que nous venons d’évoquer se retrouve aussi parmi les jeunes gens qui se posent la question de la vocation. Si les vocations les plus solides viennent de familles qui ont toujours pratiqué dans la Tradition, l’enthousiasme vient souvent de ces convertis qui ont moins reçu, mais qui sont ravis de ce qu’ils voient et qui n’ont qu’un seul désir : transmettre !

Chers fidèles, profitons de ce temps de Pâques pour renouveler notre enthousiasme, pour retrouver un engouement profond et surnaturel. Ne soyons pas comme les apôtres au moment de la Passion : ils ont fui, découragés, scandalisés par le mystère de la Croix et de la mort du Sauveur, alors qu’il le leur avait annoncé. L’Eglise a les promesses de la vie éternelle et nous n’avons aucun doute à avoir à ce sujet. Malgré la passion qu’elle subit aujourd’hui, que vouloir de plus pour être débordants d’enthousiasme envers notre sainte religion catholique et pour la paroisse que Dieu nous a donnée. « Si Dieu est avec nous, qui est contre nous » disait saint Paul.

Contemplons les disciples d’Emmaüs. Ils sont un peu l’image de ce que nous sommes. Ils étaient perdus, découragés devant l’absence de Jésus, comme nous sommes un peu perdus dans cette crise de l’Eglise, par la défaite apparente de la foi. Et pourtant le Seigneur cheminait à leur côté, comme il est toujours à notre côté. Alors ne manquons pas de le prier : « Restez avec nous Seigneur, car le soir approche et déjà le jour baisse ». Restez avec nous Seigneur, car nos saints désirs se fatiguent et notre enthousiasme diminue. Allumez en nous le feu de votre amour et faites de nous des apôtres zélés et généreux !

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  • Abbé Thibaud Favre

    Prieuré Saint Nicolas de Flüe

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