Nous devons tendre vers les sommets
Bien chers fidèles,
Vous marchez sur une arête qui n’a que 50 centimètres de large. De chaque côté, la crête surplombe le vide à plus de 500 mètres. Y tomber signifierait la mort. Où irez-vous ? A gauche, à droite ou au milieu ?
Vous vous préparez au premier essai de saut en hauteur. La barre est à 1,30 m. Que faites-vous ? Essayez-vous de frôler la barre, juste pour qu’elle ne tombe pas, ou sautez-vous le plus haut possible afin de dépasser aisément la hauteur initiale ?
Votre but est le ciel. Voulez-vous y arriver en vous efforçant à la perfection et en évitant même les plus petites imperfections, ou en évitant le péché mortel mais en vous permettant tous les plaisirs autorisés ?
Dans ces trois cas, le sage choisit la voie la plus sûre.
Laissons de côté les deux premiers exemples et parlons du troisième.
Il ne suffit pas de ne pas dépasser les bornes. Nous devons tendre vers le sommet. L’Ecriture Sainte est remplie de cette doctrine. Dans le premier commandement, Dieu nous demande un amour exclusif : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toutes tes forces ! Ceci est le premier et le plus grand commandement. » 1 Jésus réclame de nous d’être parfaits comme son Père 2 . Notre Seigneur nous défend d’enterrer les talents comme le serviteur paresseux, qui s’attire un blâme très sévère 3 .
J’insiste encore : ce n’est pas suffisant de ne pas dépasser les limites. Nous devons tendre au plus parfait.
Je veux l’illustrer par un exemple concret. Deux jeunes couples se préparent au mariage.
Le premier cherche à éviter tout ce qui blesse la chasteté. Il n’évite ainsi pas seulement les péchés mortels mais encore les péchés véniels, même les imperfections.
Le second couple pense simplement à ne pas tomber dans le péché mortel. Je suis persuadé que le résultat ne sera pas le même pour les deux couples.
Les deux couples connaîtront des tentations, les deux peut-être aussi des moments de faiblesse. Le premier s’en tirera avec un péché véniel, le second très vraisemblablement tombera plus gravement.
Vous pouvez me faire l’objection suivante : éviter le péché mortel est possible avec la grâce de Dieu, mais éviter toutes les imperfections, non. Pourquoi devrions-nous prendre la résolution de faire quelque chose que nous ne pourrons pas tenir ?
Saint Augustin posait la même question : « Pourquoi nous est-il ordonné d’aimer Dieu de tout notre cœur, bien que ce commandement ne puisse pas être accompli parfaitement dans la vie présente ? » – « Afin que nous connaissions le but auquel nous devons aspirer », voilà la réponse du grand docteur de l’Eglise. Oui, nous devons viser le plus haut possible. Car plus nous visons haut, moins nous manquerons le but. Rappelons-nous encore le saut en hauteur.
Tous les saints ont visé haut, comme le père de notre patrie, saint Nicolas de Flüe. Sa prière compte parmi les plus belles prières qui soient. Elle confirme ce que j’ai écrit ci-dessus. Récitons-la tous les jours – pour nous et pour le prochain : « Mon Seigneur et mon Dieu, ôtez de moi tout ce qui m’éloigne de vous. Mon Seigneur et mon Dieu, donnez-moi tout ce qui m’attire à vous. Mon Seigneur et mon Dieu, enlevez-moi à moi et donnez-moi tout à vous. Amen. »
Abbé Pascal Schreiber
Extrait du bulletin Le Rocher c'est le Christ n° 116 – Décembre 2018 – Janvier 2019