Juillet 2025 - Mot du supérieur

Tout récemment, un titre de journal a attiré mon attention : « L’effondrement du glacier dans le Lötschental — un avertissement pour le monde. » Ce titre, par sa portée symbolique, m’a profondément frappé. Pardonnez-moi d’évoquer un sujet d’actualité qui touche peut-être davantage un Valaisan qu’un autre, mais cette catastrophe très impressionnante a certainement marqué à travers toute la Suisse et même au-delà !
En quelques instants, un village tout entier a été presque rayé de la carte. Et ce drame, tout autant que les mots qui l’ont décrit, m’a inspiré plusieurs réflexions que je souhaite partager avec vous. Evidemment le journaliste souhaitait s’épancher sur des questions climatiques ou autre sujet connexe, mais les mots de ce titre peuvent nous laisser en imaginer davantage !
Dieu nous parle aussi par les catastrophes
Nous vivons au 21ème siècle, dans une époque qui veut tout avoir sous contrôle. Et pourtant, Dieu continue d’y inscrire ses signes — parfois dans le silence, parfois dans le fracas. Il nous parle à travers les événements, les bouleversements de la nature, les fragilités du monde créé. Il nous rappelle que rien ici-bas n’est stable, que tout peut s’effondrer en un instant — sauf Lui.
Devant la puissance des éléments, nous prenons conscience de notre petitesse. Ces forces naturelles, obéissant à des lois immuables inscrites par Dieu dans la création, échappent à notre maîtrise.
Il serait cependant erroné de ne pas non plus y souligner les capacités humaines à comprendre, anticiper, protéger. Dans cette catastrophe, l’alerte a été donnée à temps. Des mesures efficaces ont évité de lourdes pertes humaines. Cela mérite notre admiration, car lorsque la science demeure orientée vers le bien, elle devient un véritable secours.
Et dans l’épreuve, nous avons aussi vu l’élan de personnes charitables, solidaires et courageuses. Quand tout vacille, le meilleur de l’homme surgit souvent : des gestes simples et très concrets. On va plus facilement à l’essentiel !
Pourquoi ici, pourquoi maintenant ?
On pourrait s’interroger : pourquoi une telle épreuve a-t-elle frappé cette vallée paisible, modeste, si catholique ? Pourquoi là, et pas ailleurs ? Il ne nous appartient pas de juger les voies de la Providence. Dieu ne veut jamais le mal. Il le permet, toujours en vue d’un bien supérieur. Ce que nous avons vu, en revanche, ce sont des cœurs unis, un village qui veux se relever et se reconstruire.
Et nous, catholiques qui nous voulons fidèles, n’y voyons-nous pas un appel ? Un appel à vivre cette même charité concrète et de cette foi insubmersible, comme un témoignage visible de cette vallée avec toutes ses croix et ses oratoires. « Voyez comme ils s’aiment » disaient les païens des premiers chrétiens : que l’on puisse dire cela de nous aujourd’hui serait une grande grâce !
Cette catastrophe nous rappelle aussi que les progrès techniques peuvent sauver des vies. Mais ils ne suffisent pas à sauver les âmes. Chaque avancée doit être évaluée à la lumière de sa finalité : est-ce que cela sert le bien véritable de l’homme, de l’âme, du monde ? La question n’est pas seulement « Est-ce utile ? », mais : « Est-ce bien ? Est-ce que cela conduit à Dieu ? »
C’est là que le discernement vertueux doit s’exercer et qu’il est capital : toute technique, toute invention, tout pouvoir humain doit être mesuré à l’aune de la foi et de la morale.
Quel sens pour nous aujourd’hui ?
La vraie question de ce drame pour nous est le suivant : qu’allons-nous tirer de tout cela ? Quelles leçons pour nous, témoins éloignés de ces drames ? Quels fruits spirituels ?
Une épreuve peut devenir un appel et une grâce : un rappel discret de notre fragilité, un cri de retour vers notre créateur, vers le Ciel. Dieu ne veut pas tant nous effrayer que nous convertir. Mais notre monde saura-t-il entendre cet appel ? Ou répondra-t-il, comme souvent, uniquement par plus de technologie, plus de contrôle, plus d’oubli ?
Le drame de cette vallée nous rappelle que notre passage ici-bas est court, très court. Un jour, ce sera notre vie qui sera remise entre les mains de Dieu. Il faut donc vivre dès aujourd’hui comme des hommes faits pour l’éternité.
L’autre catastrophe — silencieuse, mais bien plus grave
Devant l’effondrement d’une montagne et d’un glacier, nous sommes émus. Nous aimerions aider et nous prions bien entendu. Mais nos prières et nos pensées vont forcément au-delà des pertes matérielles. Car comment resterions-nous aveugles devant une autre catastrophe, bien plus étendue : celle du péché, de la perte de la foi, de la confusion morale ? Ce sont des torrents d’égarement qui engloutissent chaque jour des âmes. Et là, presque personne pour alerter ! Presque personne pour secourir !
Ce constat devrait nous réveiller. Car c’est un cri silencieux que le monde nous adresse : qui nous aidera à retrouver Dieu ? A nous, chrétiens, de répondre. A nous d’être des veilleurs, d’être les porteurs de lumière et les témoins de l’Évangile. Evidemment, pas par nos propres forces, mais par la puissance de la grâce.
À Marie, Notre-Dame de la Visitation
Un peu plus haut que le village meurtri de Blatten, dans le hameau de Kühmad, se dresse une petite chapelle : celle de la Visitation, cette fête que nous solennisons en ce début du mois de juillet. C’est un lieu de paix, de silence, de prière. Récemment encore, l’un de nos prêtres y a célébré son jubilé sacerdotal. C’est à cette chapelle, et surtout à Notre-Dame de la Visitation, que nous voulons tout confier : ce village blessé et surtout notre pays et nos concitoyens !
Car là où Marie entre, Jésus vient. Là où elle est accueillie, la grâce descend. Prions-la pour qu’Elle visite à nouveau notre peuple et que ces épreuves deviennent l’occasion d’un réveil spirituel, d’un retour à Dieu. Qu’à travers cette vallée meurtrie, beaucoup lèvent les yeux vers le Ciel. Et que la grâce de Dieu, par Marie, touche et transforme les cœurs.
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