Janvier 2025 - Mot du supérieur

Source: District de Suisse

Chers fidèles,

Le passage d’une année à l’autre nous fait réaliser combien le temps passe vite. L’année écoulée semblait pourtant tout juste commencée… mais voilà que s’ouvre déjà devant nous une nouvelle année ! Cette perception de la caducité du temps aurait dû trouver un peu d’apaisement, ou du moins apporter un peu de ressourcement durant le temps de fête qui entoure la célébration de Noël et le passage à l’an nouveau ! Force est de constater que c’est bien souvent loin d’être le cas : visites, repas, activités s’enchaînent à un rythme effréné, si bien que l’on en ressort presque plus fatigué qu’avant ! Et ce constat, malheureusement, on pourrait l’étendre assez aisément à tout le reste de l’année. Nous sommes toujours à courir derrière nos occupations… et il n’y a que 24 heures dans une journée ! 

Que penser finalement de ce que l’on pourrait appeler une perpétuelle situation de fatigue ?

Comme catholiques, cette situation n’est pas très simple à appréhender. Pourquoi ? Parce que nous désirons faire notre devoir d’état de notre mieux et que nous souhaitons nous donner avec générosité, sans trop nous arrêter à nos fatigues, mais en n’ayant pas non plus toujours la consolation d’être récompensés de tant d’efforts consentis.

Or ce sentiment de fatigue, voire d’épuisement, est vraiment une maladie de notre temps et ce serait une erreur de la balayer d’un revers de main. Alors, comment affronter cette problématique et y remédier en bon chrétien ? Oui, comment répondre à cette sensation si répandue d’épuisement ? 

Tout d’abord en prenant ce sujet au sérieux, car nous sommes très sollicités, nous le sommes en permanence et nous parfois même nous cherchons à être sollicités. Le seul devoir d’état d’un père de famille confronté à des performances sans cesse revues à la hausse, ou celui d’une maman qui doit conduire les enfants à l’école, au sport, tout en s’occupant du petit dernier et cela en faisant les courses pour les repas… ce mode de vie moderne n’aide en rien à nous équilibrer. Mais s’y ajoute l’atmosphère d’un monde qui a perdu les pédales, qui nous submerge de virtuel et détruit le réel. Tout cela impacte nécessairement nos esprits, même à notre insu. Faire la part des choses et trouver une atmosphère saine, n’est donc plus du tout évident !

Cet état de fatigue est parfois grave et sévère, à tel point qu’il demande une prise en charge médicale ou psychologique, et il faut marteler qu’il n’y a rien d’honteux à cela. Cependant il faut éviter quelques écueils. Par exemple, dans le cas d’un suivi psychologique, il n’est pas aisé de trouver un thérapeute qui s’appuie sur de bonnes valeurs, alors que ce type d’aide professionnelle serait parfois indispensable. Certes, la prière est toujours une aide, mais il ne faut pas tout confondre ! Elle est précieuse pour offrir ou déjà supporter une maladie, une fatigue chronique, mais elle ne va pas, sauf miracle – ce qui n’est pas le mode habituel d’agir de Dieu – nous guérir d’une carie ou d’une pneumonie ! Cela vaut d’autant plus dans le domaine psychique : ici, redoubler de prière ne va pas nécessairement résoudre un surmenage mais parfois provoquer l’inverse, et ce n’est pas un manque de foi, c’est juste une question de bon sens !

Heureusement, dans la plupart des cas, nous pouvons réagir avant que l’aide d’un thérapeute soit nécessaire. Le bon Dieu a bien fait les choses, et de petits signaux que notre esprit ou notre corps nous transmettent et auxquels s’ajoutent d’aimables remarques de nos proches, nous font prendre conscience que la fatigue ou l’épuisement ne sont plus passagers, mais continuels et qu’ils impactent sérieusement notre quotidien. 

Nous cherchons alors des solutions par la lecture ou des conseils de nos proches. Parfois, il suffit de se reprendre en main en se donnant des objectifs simples comme un repos suffisant qui implique de se coucher suffisamment tôt, ou en réduisant le temps d’écran, tous appareils confondus… mais le faire avec persévérance et sérieux ! Se sentir soutenu dans cet effort peut être très productif.

Nous le disons bien clairement, ce serait une erreur grave de penser qu’une vie de prière intense dispense de trouver un bon équilibre ! Bien au contraire, la vie de prière nous aide à cultiver la prudence et à trouver en toute chose le juste milieu et ceci est totalement éloigné de toute forme de volontarisme contre lequel nous mettons volontiers en garde. On ne peut plus vivre aujourd’hui comme il y a cinquante ans, car les circonstances et le mode de vie sont radicalement différents.

D’autres écueils consistent à se jeter dans toute une panoplie de solutions dont le monde actuel regorge : entre les méthodes issues des religions de l’Orient ou les solutions-miracles de tant de charlatans ou de guérisseurs auto-proclamés, il y a de quoi se perdre. 

Gardons bien notre objectif ultime à l’esprit : la santé de l’âme reste notre unique priorité. On pourrait être tenté de se dire : ça marche, donc c’est forcément bon. Pas nécessairement ! On ne peut pas aller chez n’importe quel guérisseur ni consentir à des actes qui se rapprocheraient de la superstition. Il ne faut donc pas manquer de regarder attentivement la moralité de ce qui nous est proposé. Comme le dit si bien saint Paul, on ne fait jamais le mal pour qu’il arrive un bien.

On peut encore aller plus loin en précisant que ces pratiques doivent rester ce qu’elles sont : une méthode, rien de plus. Elles ne sont pas le but ultime de notre vie. Il est regrettable de constater parfois que la solution qui a pu aider une personne à retrouver un équilibre ou la santé, qui a pu donner un éclairage en vue d’une guérison devienne tout à coup la solution universelle et l’unique objet de toutes nos attentions.

Mais essayons de prendre de la hauteur dans ces réflexions. Quand on scrute les différentes bonnes thérapies, on en vient immanquablement à y discerner des éléments de bon sens ou des réponses que l’Eglise a toujours proposés sous une forme ou sous une autre.

On peut volontiers citer quelques exemples comme l’enseignement de l’Eglise sur la prière, sur la nécessité de se confier à Dieu au début et à la fin du jour. Tout cela rejoint parfaitement ce que toute bonne thérapie propose : se fixer un objectif, prendre le temps de réfléchir avant de répondre ou avant d’entreprendre une activité. C’est ce que fait la prière, ce cœur à cœur avec Dieu qui nous aide à bien agir en tout circonstances.

On répète aussi souvent qu’il faut vivre dans le présent. Mais c’est justement ce que nous dit notre sainte religion. Nous remettons notre passé entre les mains de Dieu, en particulier par le sacrement de pénitence, nous confions notre avenir à la Providence, et nous tâchons de vivre de notre mieux l’instant présent. 

Enfin pour clore ces exemples, on nous répète avec raison qu’il faut apprendre à se déconnecter et nous sommes bien les premiers à le prêcher. La société propose même des sessions de plusieurs jours pour pratiquer l’abstinence numérique et un nouveau métier est né : coach en « digital detox ». Mais tout cela nous vous le proposons déjà par la merveille des Exercices spirituels, en particulier ceux de saint Ignace !

Bien chers fidèles, en début de cette année 2025, il nous faut être conscients de notre faiblesse et des maux de notre temps. Mais il faut avoir la certitude que nous pouvons mener une véritable vie chrétienne, avec ce qu’elle permet de prière et de sacrifice, mais aussi de détente et de joie.

Que cette année sainte soit digne de ce nom et que puissions grandir dans l’amour de Dieu, malgré les fatigues et les adversités ou plutôt grâce aux fatigues et aux adversités !

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  • Abbé Thibaud Favre

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