Avril 2025 - Mot du supérieur

« Seigneur donnez-nous beaucoup d’enseignants catholiques ! » Voilà une belle et importante invocation ! Mais que le lecteur se rassure, nous n’allons pas l’ajouter à la petite litanie qui conclut généralement nos chapelets pour demander de saints prêtres, de saintes vocations religieuses et de saintes familles. Cependant c’est une intention de prière capitale que je me permets de recommander à vos généreuses prières. Elle va aussi occuper notre réflexion, car elle concerne le bien commun de notre société, de nos familles, finalement aussi de l’Eglise.
Commençons donc par lire quelques lignes du pape Pie XII : « De quelles autres personnes, sur terre, après les parents, dépendrait surtout le destin religieux et civil de la nation, si ce n'est des maîtres entre les mains de qui doit passer toute l'enfance ? … Le maître est l'âme de l'école. Voilà pourquoi l'Eglise tient à la personnalité et à la formation du maître autant qu'à l'école catholique même. Car le maître authentiquement catholique constitue l'élément essentiel de l'école catholique. »
Permettez-moi donc tout d’abord de rendre hommage à toutes les personnes qui se donnent avec générosité dans le domaine de l’enseignement et en particulier à celles qui le font dans nos écoles. Nous avons un devoir de les soutenir ! Elles peuvent compter sur notre reconnaissance, car leur travail est souvent caché et les attentes à leur égard, très grandes. Il n’est pas facile de gérer une classe d’une vingtaine d’enfants, tout en gardant un calme olympien, car le métier d’enseignant, s’il est exaltant, reste tout de même exigeant.
Il est exaltant par son but qui n’est autre que de former des intelligences et des volontés… Mais il est exigeant, car il réclame des qualités intellectuelles et pédagogiques indéniables, auxquelles il faut ajouter une bonne dose de patience pour tenir sa classe toute une journée durant. C’est ce qui fait de l’enseignement une vocation, car il réclame un dévouement constant. Le bon enseignant est passionné par la formation des petites âmes qu’il doit laborieusement préparer jour après jour, en remettant constamment le métier sur l’ouvrage, sans se lasser de répéter les mêmes choses années après années pour que les connaissances soient assimilées.
L’Eglise en bonne maîtresse a privilégié depuis toujours l’enseignement : « Les cent et quelques dernières années – disait toujours Pie XII – sont remplies de la lutte de l'Eglise pour l'éducation catholique de sa jeunesse et pour les écoles qui la dispensent. Là où les lois ont laissé aux catholiques le soin de créer leurs écoles en s'appuyant sur leurs propres ressources spirituelles et financières, les fidèles ont partout consenti à des sacrifices que l'on peut qualifier d'héroïques. » Nos familles sont donc dans la ligne de cette belle tradition !
Mais peut-être n’avons-nous pas suffisamment réalisé l’importance, pour notre chère Tradition, pour le futur, d’encourager les jeunes à s’orienter vers l’enseignement ? J’ai la conviction qu’il n’est heureusement pas trop tard pour le faire.
Que faire alors pour susciter des vocations d’enseignants ? Bien évidemment la prière sera le premier recours. Il nous faut compter avant tout sur la divine Providence pour susciter des jeunes qui se vouent à cette magnifique tâche, avec zèle et enthousiasme, nos écoles en ont besoin !
Evidemment, il y a des désavantages à travailler dans une école la Tradition, en particulier quant à l’aspect financier. Nous ne pouvons pas rivaliser avec les salaires étatiques et le poids de l’écolage est déjà considérable pour les parents. Cependant nous essayons de trouver des solutions viables pour tous ceux qui expriment leur intérêt à cette belle œuvre. Qu’ils n’hésitent pas à nous approcher, si la difficulté ne réside que sur ce point !
Mais les avantages sont immenses, pour nos familles, pour les enfants. Car le monde pèse sur nous tous et exerce une pression malsaine. Partout règne l’utilitarisme : l’homme moderne veut aller très vite et en faire le moins possible. Il veut tout et tout de suite. Il réagit plus qu’il ne réfléchit. Or tout le travail de l’enseignant sera de former les intelligences et les volontés pour que l’éducation soit vraiment profonde et chrétienne, pour que les jeunes acquièrent un jugement solide et aient un véritable esprit critique. C’est un travail de longue haleine et une mission où chacun doit tenir son rôle.
D’où l’importance du travail complémentaire entre parents et enseignants, où chacun peut travailler dans une bonne collaboration, en évitant deux extrêmes : se reposer sur l’autre, ou pire encore s’opposer.
Et ce défi de la collaboration est d’autant plus important que l’enjeu de l’éducation d’aujourd’hui est de former les intelligences et les volontés, de développer la mémoire et la réflexion pour échapper au grand piège des écrans. On parle de plus en plus d’intelligence artificielle et les progrès de ces systèmes sont impressionnants, voire inquiétants. Ces algorithmes n’ont d’intelligence que celle de leurs concepteurs, ils ne sont que des calculs, certes savants, géniaux, mais ce n’est pas une réelle intelligence. La différence est essentielle : d’un côté nous avons un enfant avec une âme immortelle et des facultés spirituelles ou de l’autre, une suite de calculs qu’élaborent des machines sans vie !
La technique est géniale, mais le danger réside dans l’utilisation. Il ne faudrait pas que notre jeunesse atrophie sa mémoire ou sa capacité de réflexion et de jugement à force de se reposer sur les ordinateurs et leurs logiciels et d’être collée aux écrans. Nous avons besoin des jeunes capables d’utiliser les moyens techniques de leur époque, mais sans se faire manipuler, ni prendre par la facilité. C’est donc dire toute l’importance de cette formation de l’intelligence dans la famille où c’est le rôle des parents, et à l’école où c’est celui des enseignants. Les deux doivent aller de pair et se soutenir l’un l’autre. C’est ici que ce joue le combat de demain !
L’enseignement est un métier magnifique et un travail de longue haleine. Puissions-nous voir fleurir quelques vocations d’enseignants dans nos chapelles ! Nous espérons vivement que quelques-uns sauront se dévouer et frapper à la porte de nos écoles pour mettre à disposition leurs compétences et nous aider à former la Suisse catholique de demain !
Au-delà de cette question spécifique, puissions-nous, à l’approche de la Semaine sainte, suivre l’exemple de notre Sauveur, son dévouement et sa générosité. Dieu ne laisse jamais vaincre en générosité et puissions-nous en fin de Carême nous y adonner avec charité et enthousiasme.
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