L'archange saint Michel, ange gardien de Dieu

Il est toujours prudent, au départ d’une entreprise périlleuse, de s’abriter auprès de plus puissants que soi, afin qu’aux heures où nos faibles­ses craindront de défaillir, ils sup­pléent aux lacunes de notre nature en mettant à son service les forces qu’elle n’a pas.

Et puisque nous voici au seuil d’une rentrée, il n’est pas imprudent de nous placer à l’abri du prince du monde invisible, saint Michel, gouverneur des forces célestes et des légions spirituelles qui gardent la sainteté de Dieu et des âmes où il a fait son sanctuaire.

Saint Michel, un de ces trois ar­changes (et le plus grand !) dont seuls les noms nous sont connus : Gabriel, l’Archange des bonnes nouvelles, Raphaël, l’Ange des bons secours et Michel, l’Ange des bons combats, l’ange gardien de l’honneur de Dieu, l’ange gar­dien de la paix, l'ange des plus grandes victoires, l’Archange de la fierté.

Tout cela nous est indiqué par son nom, nom que Dieu lui a donné pour indiquer sa fonction, sa mis­sion. Michel : Qui est comme Dieu ?

À lui seul, ce nom résonne comme un cri dans le ciel et sur la terre « Qui est comme Dieu ? Qui peut prétendre égaler Dieu ? Qui peut oser se mesurer à Dieu, se compa­rer à Lui, ou même se dresser face à Lui pour réclamer ou revendiquer un droit quelconque ? Qui est comme Dieu ?

Oui, ce nom seul nous dit sur Michel tout ce qu’on peut en sa­voir.

Ainsi, avant toute autre chose, Michel est l’archange des intimi­tés divines les plus secrètes. Il est l’ami le plus intime de Dieu, celui qui le connaît le mieux, celui qui se tient le plus près de son secret essentiel, de son feu d’amour substantiel qui le fait vivre. Michel est là au seuil de la charité qui est comme l’âme de Dieu, il est là qui brûle auprès de lui de l’amour le plus ardent, et qui déploie pour sa défense le zèle le plus généreux. Qui est comme Dieu ? Pour lancer, à l’univers un cri semblable, rien qu’en clamant son nom, nous sentons bien qu’il faut avoir de Dieu la plus haute connaissance ! Pour pouvoir ainsi comparer Dieu et les autres créatures, même les plus hautes, pour leur interdire d’oser se mesurer à Dieu, il faut avoir une connaissance éminente de Dieu, et de tout ce qui n’est pas Dieu. Michel est donc l’ange le plus proche de Dieu, le prince des anges, le confident de Dieu, celui auquel Dieu livre ses secrets sur Lui-même qu’il cache aux plus grands des saints. Il est l’ange qui vit son éternité dans le silence de l’amour, qui écoute, qui contemple et qui adore. Le premier des amis de Dieu, il est aussi le plus silencieux, tant l’amour se nourrit et se satisfait dans la présence plus que dans les paroles.

De Michel, nous n’avons qu’une parole rapportée par la Bible, qui nous en rapporte beaucoup plus de Gabriel et de Raphaël. De Michel : un seul cri lancé à Satan au Mont Nébo : « Imperet tibi Dominus – Que Dieu exerce sur toi son empire.” (Jude, 1, 9).

Car, s’il est l’ami silencieux, ab­sorbé dans l’adoration, il est l’ami agissant. Michel ne se réfugie pas dans la prière et l’adoration, mais il y puise les secrets de l’amour agissant et vainqueur. Il est telle­ment épris de la beauté de Dieu qu’il ne peut supporter qu’on y porte atteinte et il ressent au vif tout ombrage porté par la créature à la splendeur et à la majesté divine.

Alors, Michel devient le gardien et le vengeur des droits de Dieu, le vengeur de sa gloire et de son hon­neur. Il n’intervient pas au profit des hommes, mais il envoie ses anges pour veiller sur eux. Lui, il se réserve la garde du sanctuaire où Dieu l’a placé, il se réserve l’action supérieure au profit de Dieu dont il est en quelque sorte l’ange gardien. Oui, Michel est là, gardien jaloux, silencieux et vigi­lant des sommets où Dieu vit. Il est là qui se dresse dès que quiconque prétend s’attribuer quelque part de cette gloire qui n’appartient qu’à Dieu. Il est là qui veille auprès du cœur de Dieu pour épouser toutes ses causes et clamer à toute créature, si noble soit-elle, qui prétend se mesurer à Dieu : « Qui est comme Dieu ? Qui ose se mesurer au Roi des Cieux ? Qui ose se réclamer ou s’opposer à celui dont il a reçu tout ce qu’il est ? »

Ange des sommets de la gloire divine, Michel est l’ange qui mène les combats de Dieu et qui remporte les plus grandes victoi­res, depuis la première victoire sur Satan chassé par lui des cieux, jusqu’à son ultime et définitive victoire à la fin des temps, lorsque, tout étant accompli, il l’enfermera à jamais au lieu de la haine pour lui interdire de se mesurer à l’Amour qu’il a refusé.

Au seuil de cette rentrée, il n’est pas superflu peut-être de nous pla­cer sous le regard de saint Michel. Il est le régisseur de la puissance céleste, le gouverneur des forces invisibles de Dieu qui peuvent en un clin d’œil terrasser toutes les forces qui sur terre s’opposent au règne de Dieu.

Saint Michel ne serait-il pas assez puissant, lui, l'ange préféré àla farde duquel Dieu a confié sa gloire ? Ne serait-il pas assez puissant pour nous donner la victoire dans les combats futurs que s’apprêtent à mener contre Dieu et ses amis les héritiers de Satan, combats enga­gés d’ailleurs depuis déjà bien longtemps ?

Alors, demandons à saint Michel, qu’il nous enseigne d’abord à aimer comme lui, à nous forger, dans le silence de la prière adorante, les résolutions et les énergies de l’amour. Qu’il nous donne le goût des sommets de Dieu, ces som­mets silencieux de la prière et de la grâce où l’air est pur, où l’on puise lumière et force pour commander au monde et à Satan.

Ce n’est que là que nous acquerrons le zèle de la charité, parce que notre cœur fixé à celui de Dieu par l’adoration, n’aura plus de goût pour ce qui n’est pas Dieu. Notre cœur se gonflera d’un désir sou­verain et implacable de la gloire divine, qui nous rendra forts comme Michel, audacieux, fiers et victorieux comme lui, lorsque l’ennemi de Dieu tentera de ternir le reflet de la splendeur divine dans notre âme, lorsqu’il tentera de dis­traire à son profit, parcelle de l’amour que nous devons à Dieu ou qu’il tentera de souiller l’hon­neur du nom de Dieu dans le monde ou dans notre âme. Apprenons auprès de saint Michel, gardien jaloux et fier du sanctuaire que Dieu s’est choisi en notre âme, apprenons auprès de lui, la fierté, fierté humble de celui qui a reçu au-delà de tout ce qu’il pouvait espérer ou mériter, et fierté audacieuse pour préserver le don reçu, pour rester habité par une grandeur et une noblesse trop sublimes pour risquer de les perdre. Apprenons à être fiers d’avoir été appelés au baptême à l’honneur de servir et de garder les droits de Notre Père, au point de ne pouvoir supporter que notre cœur se laisse accrocher par un désir qui ne soit digne de notre nom.

Apprenons dans ces moments à jeter un regard vers Dieu pour en­flammer notre amour, et nous re­tourner ensuite vers l’ange de la haine et du péché pour lui com- mandes avec Michel : Que Dieu exerce sur toi son empire !

Nous aspirons aux sommets de Dieu et de la sainteté. Confions-nous à saint Michel, spécialiste des ascensions et des victoires aux sommets, que ce soit dans les cieux, au Mont Nébo, au Mont Gargan, au Mont Tombe ou à Domrémy ! Qu’il nous mène aux sommets ; que ce soit ceux de la gloire ou ceux de la Croix, peu importe ; Dieu y est présent et nous sommes faits pour eux. Michel nous y mènera, loin du monde et de son péché, pour y forger dans le silence de notre prière et de nos larmes, nos victoires futures. Confions-nous à celle que Dieu a donné pour Reine aux anges et à leur prince Michel : Marie, Reine des Victoires et Reine de la Paix.

Confions à Notre-Dame des Victoires et à l’ange victorieux, nos âmes, l’Église, nos familles, nos patries. Qu’ils veillent et qu’ils inscrivent en nous le goût, le désir, la préférence des choses célestes, et le sens de l’honneur et de la gloire de Dieu. Qu’ils nous gardent fiers de notre baptême et forts pour refuser et combattre ce qui en est indigne.

Devenons à notre tour, gardiens vigilants des droits de Dieu, jusqu’à nous battre, s’il le faut, contre ses ennemis. Si nous étions moins lâches souvent, le monde et nos cités seraient peut-être plus beaux et plus dignes de Dieu.

Que Michel réveille notre amour et notre ardeur dans les luttes que nous aurons à mener contre nous-mêmes, contre le monde et son prince, pour que le nom de Dieu soit sanctifié sur la terre par les hommes comme il l’est au ciel par Saint-Michel et sa milice. 

 


 

 

Article écrit par l'abbé Michel Simoulin dans le journal Contoverses, n° 22, d'octobre 1990