La parole de Mgr Marcel Lefebvre – Le Rocher 140
Le martyre de saint Etienne
Nous célébrons, dans l’octave de Noël, saint Etienne, les saints Innocents et l’apôtre saint Jean. L’Eglise, par ces fêtes qui suivent celle de la Nativité du Seigneur, nous montre que des âmes ont versé leur sang pour Jésus-Christ : un diacre, des enfants innocents et un prêtre.
Saint Etienne, nous disent les Actes des Apôtres, était « plenus Spiritu Sancto et fortitudine – rempli du Saint-Esprit et de force » 1 . Il proclamait sa foi en Notre-Seigneur Jésus-Christ avec un courage exceptionnel, et ce qui l’avait fait remarquer par les Apôtres.
Lorsqu’ils ont eu besoin de se faire aider par des diacres, ils ont pensé à saint Etienne. Il fut le premier parmi les sept qui furent choisis parce que sa parole produisait des merveilles : il accomplissait des prodiges extraordinaires et les gens se convertissaient. Mais évidemment, cela ne plaisait pas à ceux qui s’opposaient à Notre-Seigneur Jésus-Christ et qui ne voulaient pas que se développe cette soi-disant secte qui faisait des ravages dans Jérusalem.
Hélas, parmi ceux qui étaient les plus opposés à saint Etienne, se trouvait un jeune homme qui s’appelait Saul et qui, en ce temps-là, poursuivait les chrétiens, amenait en prison hommes, femmes, tous ceux qui croyaient en Notre-Seigneur Jésus-Christ et qui professaient leur foi. Saul était chargé de les prendre et de les emprisonner. Et voici que devant la prédication magnifique de saint Etienne, les prêtres et les Princes des prêtres s’émeuvent, requièrent Saul encore une fois et l’envoient empêcher saint Etienne de prêcher.
Le martyre de saint Etienne
On réunit un grand conseil. Et il est vraiment incroyable de penser que ces hommes – c’est ce que disent les Actes des Apôtres – qui entouraient saint Étienne, voyaient en lui la face d’un ange : « et intuentes videbant faciem angeli » 2 . Et intuentes, ils le regardaient avec attention, ils étaient stupéfaits, ils voyaient en lui la face d’un ange. Par conséquent, ils auraient dû se convertir et se dire : « Comment se fait-il que ce jeune homme si ardent à défendre sa foi, soit rayonnant comme un ange ? C’est donc que la Vérité est en lui, est avec lui. » Mais non, au contraire, ils n’en étaient que plus furieux contre lui, aussi le Prince des prêtres s’adresse à de faux-témoins venus pour déposer contre saint Etienne. Ils déclarent qu’Etienne voulait la disparition du Temple et annonçait que bientôt ce Temple disparaîtrait. Alors le Prince des prêtres s’adressant à saint Etienne lui dit : « Est-ce que ces choses qu’ils viennent de dire sont vraies ? Qu’en penses-tu ? » Et saint Etienne se sent rempli de l’Esprit-Saint, comme saint Pierre après la Pentecôte, ainsi que le rapportent les Actes des Apôtres.
Il développe alors toute l’histoire des Hébreux, depuis Abraham jusqu’aux temps actuels, montrant comment la Providence avait conduit le peuple juif pour préparer le Messie, pour préparer celui qui devait venir. Tout était orienté dans ce peuple choisi pour donner ce fruit magnifique qui devait être le Messie, le Roi d’Israël. Non pas un roi temporel comme se l’imaginait le peuple juif, mais ce roi spirituel qui dominerait sur le monde, et surtout qui entraînerait derrière lui toutes les âmes, toute l’humanité.
Mais nécessairement, pour que s’accomplissent ces prophéties, le Temple devait disparaître pour faire place à ce Temple qu’était Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même. Notre-Seigneur l’avait bien dit à ses Apôtres : « Démolissez ce Temple et je le rebâtirai en trois jours. » 3 Il parlait de son Corps, et en effet, ce Corps, ce Temple de Dieu, temple immortel ressuscité, est désormais au Ciel pour l’éternité. Ainsi donc les Princes des prêtres et tous les ennemis de saint Etienne en l’entendant parler frémissaient de rage, surtout lorsqu’il conclut cet exposé de l’histoire d’Israël en leur disant : « Vous êtes semblables à vos prédécesseurs, vous avez toujours persécuté les prophètes, vous avez toujours refusé la Vérité. Dieu a tout fait pour que vous croyiez, Dieu a tout fait pour que vous soyez le peuple choisi, or vous avez tué les prophètes et maintenant vous venez de tuer celui que Dieu vous a envoyé, le Messie. Vous venez de le crucifier. »
Les Actes des Apôtres disent qu’entendant cela, « dissecabantur cordibus suis » 4 , ils étaient outrés, leur cœur éclatait de colère contre saint Etienne qui les reprenait ainsi et désirait par là leur faire prendre conscience du péché qu’ils étaient en train de commettre en empêchant la prédication de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en empêchant de prêcher que Notre-Seigneur Jésus-Christ était le Roi, le Maître du monde entier, venu pour sauver les âmes, et qu’enfin le peuple juif avait produit celui qui devait naître et devait racheter le monde. Alors ils se précipitèrent sur lui et le lapidèrent 5 . Saint Etienne, bien loin de maudire ceux qui le lapidaient, s’agenouilla et demanda à Dieu d’avoir pitié de ceux qui le faisaient souffrir, de pardonner leur crime afin que ce martyre qu’il subissait, pût être l’occasion pour eux de leur conversion. C’est ainsi qu’il mourut.
Notre-Seigneur est un signe de contradiction
C’est là, je pense, un exemple extraordinaire de ce que représente l’histoire de l’Eglise. Lorsqu’on pense à tous les signes de sainteté que l’Eglise a manifestés par l’Esprit-Saint, à toutes les âmes généreuses et tous les saints que l’Eglise a suscités, à tous les bienfaits qu’elle a répandus dans ce monde au cours de son histoire – bienfaits de toutes sortes, non seulement spirituels mais matériels, temporels – on est surpris, on est stupéfait de constater que les ennemis de l’Eglise ne veulent rien voir. Notre-Seigneur est vraiment un signe de contradiction. Aujourd’hui encore, à notre époque, nous sommes stupéfaits à la pensée que tant de personnes ignorent Notre-Seigneur Jésus-Christ et veulent lutter contre lui.
Elles ne veulent pas entendre ce nom, c’est un fait. Que signifie ce nom de Notre-Seigneur ? Pourquoi cette opposition à Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Parce que Notre-Seigneur nous demande de pratiquer sa Loi. Notre-Seigneur est exigeant dans ce qu’il commande, c’est vrai. Sa Loi d’amour est une loi exigeante. Notre-Seigneur veut que nous l’aimions, il nous demande d’aimer : « Vous serez mes disciples, si vous observez mes commandements. Nous viendrons en vous et nous ferons notre demeure en vous, dans la mesure où vous pratiquerez mes commandements. » 6 Qu’est-ce à dire commandement d’amour ? Amour de Dieu et amour du prochain ! Il nous semble que cela devrait être facile, très simple. Non, cet amour est très exigeant ! Et si l’on aime Dieu, on ne peut plus s’aimer soi-même, on ne peut plus rechercher ses propres satisfactions. On doit d’abord obéir à Dieu, rechercher Dieu, l’adorer, le remercier.
Et vous voyez aujourd’hui encore dans les Etats qui vous entourent, ici même et dans tous les Etats soi-disant chrétiens, soi-disant catholiques, ce qu’il en est. Est-ce qu’on obéit actuellement à la Loi de Notre-Seigneur ? Au contraire, depuis quelques années on a admis dans les législations modernes des choses qui vont directement à l’opposé des lois de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Notre-Seigneur Jésus-Christ nous demande de nous aimer, et des lois sont imposées dans les législations pour tuer les autres, pour tuer notre prochain. Toutes ces lois sur le mariage, ces lois d’avortement, ces lois de la contraception sont contraires à la Loi de Dieu, contraires à la Loi de Notre-Seigneur. Et que sais-je, on pourrait les énumérer ainsi ces législations qui vont à l’encontre de la Loi de Notre-Seigneur.
Si nous avons le malheur d’élever notre voix et de dire : « Mais ceci est contraire à Notre-Seigneur Jésus-Christ, contraire à notre sainte religion, contraire aux lois d’amour que Jésus est venu nous apporter », alors on nous accuse de faire de la politique, on nous accuse d’être contre la société civile, contre les Etats qui sont les maîtres et qui ont le droit d’édicter des lois sans nécessairement avoir recours au sacerdoce, aux prêtres, à l’Eglise. Eh bien non ! Nous continuerons à prêcher Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous continuerons à dire que ces hommes doivent se soumettre à la Loi de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qu’ils n’ont pas le droit de faire des lois qui sont contraires à celles de Notre-Seigneur, car en faisant cela ils détruisent la société, ils détruisent les âmes qui devraient être des âmes soumises à Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Nous devons suivre l’exemple de saint Etienne
Aussi nous devons continuer à suivre l’exemple de ces martyrs, de saint Etienne qui n’a pas hésité à proclamer sa foi en Jésus de Nazareth. C’est ce nom de Jésus de Nazareth qui a crispé les cœurs de ses adversaires et qui a fait qu’ils se sont précipités sur lui. C’est ce que disaient aussi les Princes des prêtres à Pierre et aux Apôtres lorsqu’ils prêchaient Notre-Seigneur : « Ne parlez plus de ce nom. Taisez-vous, au sujet de Notre Seigneur Jésus-Christ. » 7 Voilà ce que l’on voudrait nous imposer. On voudrait que nous nous taisions, que nous ne parlions plus de Notre-Seigneur, alors nous serions bien vus dans la société, nous serions bien vus des ennemis de l’Eglise. Eh bien non ! Nous ne tairons pas le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ car il est notre salut, il est notre Sauveur, il est notre Grand Prêtre, il est notre Roi, et il n’y a pas de voie pour aller au Ciel en dehors de lui. Alors nous continuerons à prêcher Notre-Seigneur, quoi qu’il arrive.
Et si aujourd’hui nous sommes persécutés, même ici dans cette maison, si nous sommes persécutés c’est parce que nous prêchons le règne social de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ne nous faisons pas d’illusion. Pourquoi cette tempête contre Ecône, sinon parce qu’ils savent qu’ici nous prêchons Notre-Seigneur Jésus-Christ et que ceux qui sortiront d’ici prêcheront le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Les rois et les princes de ce monde tremblent parce qu’ils ne veulent pas entendre parler de Notre-Seigneur Jésus-Christ, parce que Notre-Seigneur les condamne. Eh bien, nous continuerons malgré tout, malgré les persécutions ; dussions-nous être martyrisés comme l’ont été ceux qui ont professé Notre-Seigneur Jésus-Christ ! Nous continuerons toujours à prêcher celui qui est notre Roi, celui qui est notre seul salut.
Nous demanderons aujourd’hui à saint Etienne, lui qui n’a pas hésité à donner sa vie pour prêcher Notre-Seigneur, de mettre dans nos cœurs ce courage de prêcher Notre-Seigneur Jésus-Christ envers et contre tout, en toute occasion, afin que les âmes le connaissent, que les âmes qui recherchent Notre-Seigneur Jésus-Christ puissent venir, puissent l’aimer, le trouver et faire leur salut. Nous le demanderons encore à la très sainte Vierge Marie, elle qui n’a pas eu d’autre nom sur ses lèvres que celui de son divin Fils.
Mgr Marcel Lefebvre
(Dimanche dans l’octave de Noël, mémoire de saint Etienne, Ecône, 26 /12/1976)