La parole de Mgr Marcel Lefebvre – Le Rocher 136
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Le prêtre est fait pour l’autel, pour amener les âmes autour de l’autel
Qu’est-ce qui fait la dignité du prêtre, qu’il est vraiment un homme à part des autres, qu’il n’est plus un homme comme les autres ?
La Providence, dans sa Sagesse, prépare toutes choses de longue date. Aussi, mes biens chers amis, vous qui allez recevoir les ordinations aujourd’hui, ordres mineurs, sous-diaconat, prêtrise, veuillez jeter un regard sur la préparation que la Providence, que Dieu dans sa Sagesse, a voulu que vous fassiez avant de recevoir ces ordinations.
Action de grâce
Il faut qu’aujourd’hui vos âmes soient dans l’action de grâce pour tout ce que vous avez reçu de Dieu, tous les dons, toutes les grâces que le bon Dieu vous a faites. Songez à vos familles chrétiennes, remerciez Dieu de les avoir ici présentes, et si des membres de votre famille ont déjà été rappelés par le Bon Dieu au Ciel, soyez certains qu’aujourd’hui vos parents sont au milieu de nous et qu’ils se réjouissent avec vous des ordinations que vous allez recevoir. Pour vous chers amis, qui venez d’au-delà des mers, qui avez quitté votre grand pays d’Amérique pour recevoir ces ordinations, vous n’avez pas la joie d’avoir vos parents qui vous entourent. Mais voyez comme vous êtes accueillis ici par Monseigneur Adam qui a eu la gentillesse et l’amabilité de nous permettre de venir dans cette paroisse 1, accueillis aussi par le cher Monsieur le Curé [Henri Bonvin] qui a ouvert si largement les portes de son église pour nous accueillir également, et puis par toute la population que je tiens à remercier aujourd’hui particulièrement de son accueil si aimable et de venir partager notre joie et nos prières. Aussi, chers amis, ce sera pour vous un peu votre famille. Ces personnes qui sont ici et qui se réjouissent avec vous, qui prieront avec vous, remplaceront les parents qui sont restés au loin. Et je profite de ces paroles pour remercier aussi tous ceux qui ont collaboré d’une manière ou d’une autre à la préparation de cette belle cérémonie. Ainsi, soyez dans l’action de grâce, remerciez le Bon Dieu, et si toutefois dans votre préparation tout n’a pas été parfait, si vous n’avez pas toujours correspondu aux grâces du Bon Dieu, eh bien que votre cœur s’humilie aussi devant Notre Seigneur, devant le Bon Dieu pour lui demander pardon. Et vous savez que Notre-Seigneur ne rejette pas le cœur contrit et humilié : Cor contritum et humiliatum, Deus, non despicies 2.
Le prêtre et la très sainte Vierge Marie
Et maintenant il nous est bon de jeter un regard sur le présent. Voici que, dans quelques instants, vous allez recevoir des grâces extraordinaires, surtout vous mes chers amis qui allez être ordonnés prêtres. Prêtres du Seigneur, prêtres comme Notre Seigneur Jésus-Christ, prêtres pour continuer le sacerdoce de Notre Seigneur Jésus-Christ, quelle grâce extraordinaire ! Comment est-il possible que des hommes, des pauvres créatures comme nous sommes puissions recevoir des grâces aussi riches, aussi abondantes que celles du sacerdoce. Aujourd’hui, malheureusement, on parle du sacerdoce de tant et de tant de manière qu’on ne sait plus ce qu’est le prêtre, on oublie ce qu’est le prêtre. Et c’est pourquoi je voudrais faire une comparaison, que je vous ai déjà d’ailleurs faite mes chers amis : rapprocher les dons qui ont été faits à la très sainte Vierge Marie et qui sont faits également aux prêtres.
D’où découlent les privilèges, toutes les grâces que la très sainte Vierge a reçues ici bas ? – De sa maternité divine. C’est parce que Marie a été mère de Jésus qu’elle a été immaculée dans sa conception, qu’elle a été toujours vierge, qu’elle a été élevée dans le Ciel par son Assomption. Toutes les grâces que Marie a reçues, elle les tient de sa maternité divine, parce qu’elle a été mère de Jésus. Elle qui a porté Jésus dans son sein. Dieu pouvait-il faire une plus grande grâce à une créature ici-bas, porter le Fils de Dieu, le Fils de Dieu !
Faire descendre Jésus sur l’autel
Eh bien mes chers amis, vous, prêtres, quelle est la source de votre dignité ? Qu’est-ce qui fait que vous êtes vraiment des hommes à part des autres, que vous n’êtes plus des hommes comme les autres ? Parce que, par les paroles que vous prononcerez à la consécration vous avez le pouvoir extraordinaire de faire descendre Jésus sur l’autel. Comme la Vierge Marie a prononcé son fiat et à ce moment-là Jésus est descendu en elle, ainsi, vous, prêtres du Seigneur, lorsque vous prononcez les paroles de la consécration, vous faites de nouveau descendre Jésus sur la terre, sur nos autels. Voilà ce qui fait votre dignité, voilà ce qu’est le prêtre, voilà toute la raison essentielle et fondamentale du prêtre : continuer le sacrifice de la croix, continuer le sacrifice de Notre-Seigneur sur nos autels en faisant en sorte que Jésus soit là présent : la même victime qui était sur la croix, la voilà maintenant présente sous les espèces eucharistiques du pain et du vin. Notre-Seigneur est là, de la même manière qu’il était sur la croix, avec son Corps, son Sang, son Ame, sa Divinité. Nous devons l’adorer, nous devons adorer l’eucharistie parce que Jésus est présent. C’est le même sacrifice qui se continue : le sacrifice de la croix. C’est le même prêtre qui offre ce sacrifice, car, nous prêtres, nous ne sommes que des instruments de Notre-Seigneur, nous n’agissons que dans la personne même de Notre-Seigneur.
Le prêtre est fait pour l’autel
Ainsi le prêtre est fait pour l’autel. Et voyez-vous, les ordinations qui vont avoir lieu dans quelques instants, elles ont lieu à l’autel, le prêtre va monter à l’autel et il va dire la messe avec l’évêque. Ces deux jeunes prêtres qui vont être dans quelques instants ordonnés, et recevoir par conséquent le caractère de prêtre imprimé dans leur âme de telle sorte que, quoiqu’ils fassent, jamais plus ils ne pourront enlever ce caractère sacerdotal, ces prêtres vont monter à l’autel pour la première fois. Pour la première fois ils vont prononcer les paroles de la consécration avec l’évêque, ce sera donc ainsi leur première messe.
La prédication : amener les fidèles à l’autel
Comme tout cela est beau, mes bien chers frères, comme le prêtre est grand, comme le prêtre est noble ! C’est pourquoi nous devons le respecter, et c’est pourquoi aussi le prêtre doit se respecter lui-même. Voilà quelle est la dignité du prêtre ! Car le prêtre est fait pour l’autel. Il est fait sans doute aussi pour l’évangélisation, il doit prêcher l’évangile. Mais pourquoi prêcher l’évangile, sinon pour amener tout le monde autour de l’autel, pour amener les fidèles à participer au Corps de Notre Seigneur Jésus-Christ, pour les appeler, par la baptême, par la communion, par la Sainte Eucharistie recevoir Jésus dans leur cœur et dans leur âme.
Quelle est la plus belle chose pour le prêtre que de donner la sainte communion. Donner la sainte communion : il ne peut rien faire de plus beau et de plus grand. Que pouvez-vous recevoir de plus beau de la main du prêtre sinon Jésus lui-même. Jésus, le Fils de Dieu, le Sauveur de l’humanité, le Rédempteur du monde, le prêtre le tient dans ses mains pour le donner aux fidèles. Quelle est la plus belle chose que le prêtre puisse faire, c’est toute sa vie, donner Jésus aux âmes. Et par les autres sacrements, c’est la même chose que fait le prêtre : il donne Jésus aux âmes. Alors voilà la grandeur du prêtre.
Engendrer Jésus dans les âmes par l’œuvre du Saint-Esprit
Et comment Marie est-elle devenue Mère de Jésus ? – Elle l’est devenue par l’opération du Saint-Esprit. C’est l’ange qui lui a dit. La Vierge Marie était surprise par la nouvelle que l’ange lui annonçait : « Voici que vous deviendrez la mère du Fils de Dieu » ; – « Mais comment cela se fera-t-il ? », dit la très sainte Vierge dans sa pureté, dans son innocence : « Le Saint-Esprit descendra en vous et de vous naîtra le Sauveur du monde. » C’est alors que la très sainte Vierge Marie a prononcé son fiat.
Eh bien rapprochez ce fait de la descente du Saint-Esprit dans le cœur de la très sainte Vierge pour que naisse Jésus dans son sein, rapprochez cela de la Pentecôte. De même, à la Pentecôte, le Saint-Esprit est descendu aussi sur les apôtres, par l’intermédiaire de la sainte Vierge qui était présente. Elle était présente avec les apôtres le jour de la Pentecôte, ce jour que nous fêtons aujourd’hui. C’est par la Vierge Marie que le Saint-Esprit est descendu sur les apôtres. Jésus est né dans le sein de la Très Sainte Vierge Marie, ainsi les apôtres ont fait naître Jésus également dans le cœur de tous les fidèles auxquels ils ont prêché ensuite. Et c’est cela le prêtre. Le prêtre répand Jésus dans les cœurs, il le répand par l’intermédiaire du Saint-Esprit. C’est l’œuvre du Saint-Esprit. Et c’est pourquoi nous ne pouvions pas choisir un jour plus adapté, plus parfait que celui de la Pentecôte, jour où le Saint-Esprit est descendu sur les apôtres.
Prêtres zélés
Alors, mes bien chers frères, il nous reste à prier de tout cœur, tous, pour ceux qui vont être ordonnés, afin que le Bon Dieu répande vraiment le Saint-Esprit dans leurs âmes, que ce soient des apôtres zélés, des prêtres saints, des prêtres comme vous les aimez, comme vous les désirez, des prêtres comme ceux que vous avez eu, et ceux que vous avez. Voilà les prêtres zélés qui se dévouent, corps et âme, nuit et jour à ceux auxquels ils sont envoyés. Qu’ils s’occupent des âmes, des âmes de ceux vers lesquels ils sont envoyés.
Semer Dieu et récolter les âmes
Et aujourd’hui, fête de la Pentecôte, cela nous rappelle que dans l’Ancien Testament c’était la fête des moissons, et c’était aussi le rappel des Tables du Décalogue qui étaient données à Moïse. Eh bien le prêtre ne fait pas autre chose : le prêtre récolte la moisson. Ces prêtres vont récolter et engranger les âmes de ceux qu’ils évangéliseront pour les conduire à la vie éternelle. Et puis ils leur prêcheront le Décalogue, ils prêcheront l’amour de Dieu et l’amour du prochain, c’est cela que fait le prêtre, ce n’est pas bien difficile, c’est bien simple ce que le prêtre doit faire : faire en sorte que tout le monde aime le bon Dieu, d’abord aimer le bon Dieu et, parce qu’on aime le bon Dieu, aimer son prochain et se dévouer à son prochain, telle est la vie chrétienne, ce n’est pas autre chose.
Alors, chers amis, c’est cela que vous ferez plus tard. C’est cela que vous mettrez dans vos cœurs, n’est-ce pas, et que vous ferez afin de réaliser vraiment l’oeuvre que Notre-Seigneur et que la très sainte Vierge veulent réaliser par vous.
Mgr Marcel Lefebvre
(Ordinations à FuIly, fête de la Pentecôte, le 21 mai 1972)
- 1La première année de spiritualité a commencé à Ecône en octobre 1970 avec l’accord de Mgr Nestor Adam, évêque de Sion, résultant des entretiens que Mgr Lefebvre et Me Roger Lovey avaient eus avec lui depuis 1969… Vers le 20 décembre 1970, Mgr Lefebvre prend la décision d’installer le séminaire à Ecône mais ne veut rien entreprendre sans l’autorisation de Mgr Adam qui donne son accord lors d’une entrevue le 26 décembre 1970. Mgr Adam rendit plusieurs visites à Ecône : 30 avril 1971, 17 février 1972 et 8 mars 1972. C’est dans ce climat de bonne entente entre Mgr Lefebvre et Mgr Adam que purent avoir lieu ces ordinations à Fully.
- 2Psaume 50:19.