La parole de Mgr Marcel Lefebvre – Le Rocher 129

Nous ne trouvons plus la charité de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans nos sociétés

Si nous ne voulons plus de Notre-Seigneur Jésus-Christ comme Roi, nous aurons le démon comme roi. Nous sommes dans une société dure, pénible, qui ne pratique plus la charité. Notre-Seigneur Jésus-Christ a vaincu le démon, vaincu le péché, par le bois de la Croix.

Dans ces temps qui sont durs, dans ces temps qui nous privent de ce qu’avaient les chrétiens autrefois, nous avons besoin de la manifestation de la charité de Notre-Seigneur qui était évidente, durant les siècles de chrétienté. Partout on trouvait des maisons religieuses ; dans toute la chrétienté se multipliaient les monastères, les couvents, les hôtels-Dieu, que sais-je ? Combien de maisons religieuses peuplaient nos villages, nos campagnes et nos villes, de telle sorte que nous avions cette impression – je pense que les personnes qui ont vécu ces temps avaient l’impression – de baigner en quelque sorte, dans l’amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Parce que son amour se manifestait, je pourrais dire, à tous les coins de nos rues : on y voyait des calvaires, des images de la Vierge, des hôtels-Dieu, des maisons de charité pour recevoir les pauvres, les pèlerins, ceux qui souffraient. Partout se manifestait la charité de Notre-Seigneur.

Mais en notre temps… combien notre siècle est devenu dur ! Nous ne trouvons plus cette charité de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans nos cités, dans nos campagnes. O certes, il y a encore des âmes qui se dévouent à Notre-Seigneur, mais combien par rapport à la population ? Et combien y aurait-il à faire dans tous ces pays qui ne connaissent pas encore la charité de Notre-Seigneur ? Des pays immenses, comme la Chine, l’Afrique et combien d’autres, sont encore éloignés de cette charité de Notre-Seigneur.

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Nous avons besoin de l’affection du Cœur immaculé de Marie

Alors, il me semble que nous avons besoin de la très sainte Vierge Marie en notre temps. Nous avons besoin du cœur de la très sainte Vierge Marie, pour nous aider à nous maintenir dans notre foi, sentir cette chaleur de l’amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ pour nous. Ne le voyant plus sous nos yeux, le voyant de moins en moins, nous avons besoin de sentir que la Vierge Marie est auprès de nous, et je pense que c’est cela qui a fait que la Vierge Marie, à Fatima, a demandé que l’on prie son Cœur immaculé. Nous avons besoin de cette affection divine qui est répandue dans le cœur de la Vierge Marie. Et nous avons besoin aussi de son Cœur immaculé ; immaculé, c’est-à-dire sans tache, sans péché.

Or, Dieu sait précisément que nous n’avons plus autour de nous l’exemple de ces vies qui sont tout entières données à Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui réalisent la loi de Notre-Seigneur Jésus-Christ, sa loi d’amour – car enfin les commandements de Dieu se résument dans l’amour de Dieu et dans l’amour du prochain. Mais, aujourd’hui, vous êtes les témoins de ce qui se passe dans nos sociétés où l’on assassine les enfants, où les gens se suicident. Ne savez-vous pas qu’ici, en Suisse, il y a davantage de suicides que de morts par accidents de voiture ? On l’a publié dans un journal il y a peu de temps : il y a eu 1’800 suicides au cours de l’année dernière, alors qu’il n’y a eu que 1’600 morts par accidents de la route, 1’800 suicides ! Et en général des jeunes. 1 Qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie que ces pauvres âmes qui se sont suicidées, ne sentaient plus la charité de Notre-Seigneur autour d’elles, étaient dégoûtées de cette vie qui les entourait. Et si l’on publiait ce qui se fait dans bien d’autres pays, nous serions épouvantés. Que l’on songe aux divorces, que l’on songe à tous ces enfants abandonnés qui ne savent plus vers qui aller, ou à leur mère, ou à leur père ! Nous sommes dans une société dure, pénible, qui ne pratique plus la charité.

C’est d’ailleurs ce que personnellement j’avais surtout éprouvé lorsque je me trouvais au milieu de ces nations africaines, vers lesquelles j’ai été envoyé pendant trente ans. Ce qui me frappait le plus, c’étaient des sentiments de haine. Ces gens nourrissaient souvent d’un village à l’autre, la haine, dans un village d’une famille à l’autre, la haine. Il s’en suivait des suicides, des empoisonnements, des homicides, à cause de cette haine. L’amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ ne régnait pas.

Le cœur aimant de la très sainte Vierge, notre modèle

Nous ne savons pas quel bonheur nous avons d’avoir Notre-Seigneur Jésus-Christ pour Père et la très sainte Vierge Marie pour mère. C’est là qu’il nous faut puiser vraiment notre amour pour le bon Dieu et nos modèles, car enfin, si la très sainte Vierge avait un cœur aimant, elle ne l’avait que pour Notre-Seigneur Jésus-Christ et pour ceux qui lui étaient attachés, pour conduire toutes les âmes à Notre-Seigneur Jésus-Christ, à son Fils Jésus. Elle vivait de cet amour, et parce qu’elle a aimé Notre-Seigneur, elle n’a jamais pu l’offenser, elle ne le pouvait pas. Elle est née immaculée dans sa conception, immaculée à sa naissance et elle est demeurée immaculée toute sa vie. Elle est donc pour nous un modèle de la pureté du cœur, un modèle de cette obéissance à la loi de Notre-Seigneur Jésus-Christ, et parce qu’elle a aimé Notre-Seigneur, elle a voulu souffrir avec lui, partager ses souffrances.

C’est le signe de l’amour, de partager les souffrances. Elle a vu Jésus, son Fils, souffrir et elle a voulu souffrir avec Lui. Quand le Cœur de Jésus était transpercé, son cœur l’a été aussi, le cœur de Marie ! Ces deux cœurs transpercés n’ont vécu qu’à l’unisson pour la gloire du bon Dieu, pour le règne de Dieu, pour le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Ils n’ont battu que pour cela.

Et c’est pourquoi nous aussi, nous devons être prêts à souffrir pour le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Notre-Seigneur Jésus-Christ ne règne plus dans nos sociétés, ne règne plus dans nos familles, ne règne plus en nous-mêmes. Nous avons besoin de ce règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’est la seule raison d’existence de nos âmes, de nos corps, de l’humanité, de cette terre et de toute la création de Dieu : que Jésus-Christ règne ! Qu’il apporte aux âmes sa vie, son salut, sa charité, sa gloire !

La messe proclame le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ

Et précisément nous avons conscience de ce qui s’est passé depuis quinze ans dans la sainte Eglise : une véritable révolution s’est opérée, qui s’attaque à la royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui veut détruire le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; c’est clair, c’est net. Ouvrons les yeux, nous pouvons le constater : on n’obéit plus à la Loi de Notre-Seigneur Jésus-Christ et, malheureusement, ceux qui devraient nous apprendre à obéir à cette Loi nous encouragent au contraire à y désobéir. En effet, quand on veut la laïcité des Etats, on détruit le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Lorsque l’on met en doute la réalité de la sainteté du mariage et les lois du mariage, on détruit l’amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans les foyers. Lorsqu’on ne dit rien, lorsqu’on ne parle pas fortement, ouvertement contre l’avortement, on ne fait pas régner Notre-Seigneur Jésus-Christ. Lorsqu’on détruit le culte de la royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, on détruit aussi le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans les âmes.

Or, le saint Sacrifice de la messe n’est pas autre chose, mes bien chers frères, que la proclamation du règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Par quoi Notre-Seigneur Jésus-Christ a-t-il régné ? « Regnavit a ligno Crucis. Il a régné par le bois de la Croix. » 2 Il a vaincu le démon, il a vaincu le péché par le bois de la Croix. Ainsi, en renouvelant le saint sacrifice de Notre-Seigneur et son Calvaire sur l’autel, nous affirmons la royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, nous affirmons sa divinité.

Et en détruisant, en quelque sorte, notre saint sacrifice de la messe, on a détruit l’affirmation de la royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ et de sa divinité.

C’est pourquoi l’adoration de la sainte Eucharistie a tant diminué de nos temps, pour ne pas dire que les sacrilèges se sont multipliés à l’infini. Depuis le concile, il faut le dire, c’est clair, c’est net, on a relégué Notre-Seigneur Jésus-Christ dans la sainte Eucharistie hors de nos autels ; on ne l’adore plus, on ne veut plus faire la génuflexion devant la sainte Eucharistie. Et pourtant, c’est cela le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ : reconnaître qu’il est Dieu, reconnaître qu’il est notre Roi. Et par conséquent, nous devons manifester cet amour de Notre-Seigneur Jésus-Christ, l’existence de sa divinité. (…)

Et si un jour les armées des communistes déferlent sur nos pays, eh bien, nous l’aurons mérité par les sacrilèges qui auront été commis, que nous aurons admis, que nous aurons laissé faire, par le manque d’honneur que nous aurons eu envers Notre-Seigneur Jésus-Christ. Nous ne voulons plus de Notre-Seigneur Jésus-Christ comme Roi : nous aurons le démon comme roi. Il viendra, et alors nous pourrons parler de liberté… Cette liberté qui veut tout simplement libérer l’homme des commandements de Dieu et de l’Eglise. Libération ! On a voulu se libérer de Notre-Seigneur… on aura un autre prince qui viendra nous apprendre la liberté !

Alors, nous qui avons le bonheur de comprendre ces choses, qui avons le bonheur de croire encore en la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en sa royauté, nous devons le clamer dans nos familles, partout où nous sommes, nous réunir là où il y a des groupes de chrétiens qui croient encore en la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en sa royauté et qui ont l’amour dans leur cœur, l’amour que la très sainte Vierge avait pour son Fils Jésus.

Eh bien, ceux qui ont cet amour-là, qu’ils se réunissent et qu’ils tiennent fermement, sans hésiter. Ce sont eux qui sont l’Eglise, ce sont eux, et non ceux qui détruisent le règne de Notre-Seigneur. (…) Ce n’est pas nous qui faisons schisme. Nous, nous voulons ce règne de Notre-Seigneur, nous voulons qu’on le proclame !

Mgr Marcel Lefebvre

(Homélie à Ecône, 22 août 1976)

  • 1Mgr Lefebvre parle des statistiques de l’année 1975. Mais les données sont restées sensiblement les mêmes de nos jours : « Les toutes dernières statistiques viennent de l’indiquer : la première cause de mortalité chez les jeunes Suisses de 15 à 29 ans est le suicide. Les chiffres dépassent les principales causes de mortalité dans cette tranche d’âge, comme les accidents de la route, les accidents violents et les cancers. » Léonore Dupanloup (blogs.letemps.ch/lisa-dubin – 26/02/2018)
  • 2Hymne Vexilla Regis.