Commentaire des Litanies du Sacré-Coeur

Que signifie l'expression "Sacré-Coeur de Jésus" ?

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Nous nous proposons de faire le commentaire de ces Litanies du Sacré-Cœur de Jésus, parce qu’elles doivent être considérées comme une prière importante, dont l’intelligence, unie au fervent et fréquent usage, contribuera puissamment à perfectionner le culte spécial que l’Église nous engage à rendre au Sacré-Cœur de Jésus ; et cela pour deux motifs.

D’une part, ces invocations contiennent en résumé toute la doctrine catholique concernant le Sacré-Cœur et le culte qui lui est dû. Elles énumèrent très succinctement mais très complètement et dans un ordre parfait l’objet, les raisons et la nature de ce culte, ainsi que les motifs qui nous excitent à le rendre au Sacré-Cœur.

D’autre part ces Litanies, ayant été approuvées par la Congrégation des Rites par ordre du Pape Léon XIII pour le culte privé et public dans toute l’Église, sont devenues une prière liturgique, au même titre que les Litanies du très Saint Nom de Jésus insérées au Rituel romain.

Cela nous donne une absolue certitude que cette doctrine est en tout conforme aux enseignements de l’Église catholique et que, par conséquent, il ne s’y trouve rien de faux ni d’exagéré : que le Sacré-Cœur de Jésus possède réellement toutes les propriétés et perfections, qui lui sont attribuées ; qu’il mérite tous les titres élogieux qui lui sont donnés et le culte qui lui est décerné.

Au sens propre le Cœur de Jésus est un organe vivant, appartenant à la nature humaine toujours vivante de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Directement nous signifions l’organe matériel ; indirectement, l’âme, principe spirituel qui vivifie cet organe : et puisque Jésus est la Personne du Verbe Incarné, les mots de Jésus expriment l’union hypostatique de ce Cœur avec la personne du Verbe.

Au sens figuré ou métaphorique le Cœur de Jésus signifie l’amour créé, humain, de Jésus, c'est-à-dire à la fois son amour sensible, et puis son amour spirituel qui est dépourvu d’organe et indépendant de la matière. Enfin dans un sens plus élevé et symbolique le Cœur de Jésus désigne l’amour incréé, la charité divine de Jésus, dont la charité humaine est l’instrument, et dont le Cœur est le symbole.

"Le Cœur de Jésus-Christ, dit Muzzarelli, se prend dans le sens propre et naturel, et alors il signifie son Cœur de chair, cependant toujours considéré comme uni à son humanité et à la personne du Verbe. Le Cœur de Jésus-Christ se prend aussi dans un sens symbolique et métaphorique, et alors il signifie sa volonté et son amour. Et quoiqu’il y ait en Jésus-Christ deux natures, deux volontés et deux opérations, nous voulons néanmoins, sous le nom de Cœur symbolisé, comprendre l’amour incréé et l’amour créé de Jésus-Christ, puisque son Cœur est le symbole des deux, et que les deux natures et les deux volontés subsistent dans la même personne. Ainsi en nommant le Cœur de Jésus dans le sens symbolique et métaphorique, nous entendons proprement l’amour de Jésus-Christ Dieu et homme."

Dans les Litanies du Sacré-Cœur de Jésus, ces mots répétés à chaque invocation gardent le sens, à la fois propre et figuré qu’ils ont dans le langage usuel des fidèles et de l’Église. Ils expriment en conséquence le Cœur matériel, vivant organe de la nature humaine du divin Rédempteur : en même temps ils signifient l’amour divin et l’amour humain de Jésus-Christ : enfin ils désignent ces deux objets par manière d’un seul, en raison de leur jonction intime dans la personne de Jésus ; la personne est visée indirectement, son Cœur, d’une manière directe ; aussi les Litanies énoncent-elles la personne de Jésus dans chaque invocation.

Il suffit de jeter un coup d’œil sur les différentes invocations des Litanies pour se convaincre que ce sens traditionnel et usuel des mots Cœur Sacré de Jésus y est conservé. Les unes énoncent des perfections qui sont principalement propres au Cœur de chair vivant, comme celle-ci : Cœur de Jésus formé par l’Esprit-Saint dans le sein de la Vierge Mère. Les autres expriment des propriétés spirituelles qui conviennent principalement à l’âme, à la volonté de Jésus, comme celle-ci : Cœur de Jésus, abîme de toutes les vertus. D’autres se rapportent également à l’un et l’autre objet, considéré comme intimement uni à la Personne du Verbe, par exemple : Cœur de Jésus, victime des pécheurs. Et toutes sont adressées au même Cœur de Jésus.

L’Église nous fait honorer par le culte du Sacré-Cœur, non pas le Cœur de chair abstraction faite de l’amour que ce Cœur représente ; ni seulement son amour, abstraction faite du Cœur pris au sens propre et matériel ; elle nous fait honorer d’un seul et même culte l’amour de Jésus, que le Cœur de chair figure, et ce Cœur lui-même, emblème et instrument de l’amour.

[Le Roy, Les litanies du Sacré-Cœur]