Dom Marmion – 1ère semaine de la Passion

Source: District de Suisse

Eglise Notre-Dame du Crann – Spézet

2 avril, Dimanche de la Passion 

Le Christ Jésus, Pontife sans tache, victime universelle

Le Christ Jésus est le propre Fils unique de Dieu ; il est l'objet des complaisances de son Père, toute l'œuvre de son Père est de le glorifier : « Clarificavi et iterum clarificabo – Je l'ai glorifié et je le glorifierai » ; car il est la plénitude de grâce. C'est un pontife innocent ; s'il est semblable à nous, il ne connaît pourtant ni péché ni imperfection : « Qui, disait-il aux Juifs, me convaincra de péché ? » « Le prince du monde, Satan, n'a rien en moi qui lui appartienne. »

C'est si vrai, que c'est inutilement que ses plus acharnés ennemis ont fouillé sa vie, examiné sa doctrine, épié tous ses actes et toutes ses paroles : ils n'ont pas trouvé de motif pour le condamner ; pour inventer un prétexte, il a fallu recourir à de faux témoins. Jésus est la pureté même, le « reflet des perfections infinies de son Père, la splendeur tout éclatante de sa gloire ».

Et pourtant, quand le moment est venu pour Jésus de solder à notre place la dette due à la justice pour les péchés, le Père a frappé cet « agneau de Dieu » qui s'est substitué aux pécheurs.

Le prophète Isaïe traçait par avance un portrait saisissant des souffrances du Christ : « Beaucoup ont été dans la stupeur en le voyant, tant il était défiguré. Son aspect n'était plus celui d'un homme, ni son visage celui des enfants des hommes ; il n'avait plus ni forme ni beauté pour attirer nos regards, ni apparence pour exciter notre amour... Homme de douleur, que la souffrance a touché, objet devant lequel on se couvre le visage... Vraiment, c'était de nos douleurs qu'il était chargé... Il a été transpercé à cause de nos péchés et brisé à cause de nos iniquités. Le Seigneur a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous... Il a été mis à mort par une injuste condamnation. Car il a plu au Seigneur de le briser par la souffrance... »

Le Christ, vie de l'âme, pp. 208, 209.


Lundi de la Passion

Le Christ, source de toute grâce

Dieu veut notre sanctification. « Haec est voluntas Dei, sanctificatio vestra – La volonté de Dieu, c'est votre sanctification ». Le Christ le répète : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait... »

Or, ce n'est pas dans les moyens extraordinaires, les ravissements, les extases, que Notre-Seigneur a placé normalement la vie qu'il veut nous communiquer : c'est d'abord dans les sacrements... « Puisons donc avec joie à ces sources de salut » ; dilatons, par le repentir, l'humilité, la confiance et surtout par l'amour, la capacité de nos âmes, afin que l'action des sacrements se fasse et plus profonde, et plus vaste, et plus durable. Chaque fois que nous en approchons, renouvelons notre foi dans les richesses du Christ qui les a fait jaillir, par ses mérites infinis, du pied de sa croix, ou mieux, du fond de son cœur sacré.

Si nous voulons vivre chrétiennement, si nous cherchons la perfection, si nous tendons à la sainteté, venons nous abreuver à ces sources qui jaillissent de la croix, de l'amour du Christ ; toutes nous appliquent les fruits de la mort du Sauveur par la vertu de son sang. Ce sont là des sources de vie ici-bas, de gloire là-haut.

« Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive... », car « qui boit de l'eau que je donne, n'aura plus jamais soif, et cette eau que je lui donnerai deviendra en lui une source jaillissante qui le fera vivre pour la vie éternelle ».

Venez, mes bien-aimés, semble nous dire le Sauveur, venez vous abreuver : Inebriamini, carissimi ; venez boire à ces sources par lesquelles, sous le voile de la foi, je vous communique ici-bas ma propre vie, jusqu'au jour où, tous les symboles ayant disparu, je vous enivrerai moi-même du torrent de ma béatitude, dans l'éternelle clarté de ma lumière : In lumine tuo videbimus lumen... et torrente voluptatis tuae potabis eos.

Le Christ, vie de l'âme, p. 92 et suiv.


Mardi de la Passion

Nécessité de la foi en la divinité du Christ

Durant la vie mortelle de Jésus, sa divinité était cachée sous le voile de l’humanité ; même pour ceux qui vivaient avec lui, sa divinité était un objet de foi. Sans doute, les Juifs se rendaient compte de la sublimité de sa doctrine. « Quel homme, répétaient-ils, a jamais parlé comme cet homme ? » Ils étaient témoins d'œuvres « que Dieu seul, disaient-ils, peut faire ». Mais ils voyaient aussi que le Christ était homme ; il est dit que ses proches mêmes, qui ne l'avaient connu que dans l'atelier de Nazareth, ne croyaient pas en lui, malgré ses miracles.

Pour nous, comme pour les Juifs de son temps, la foi en la divinité du Christ Jésus constitue le premier pas vers la vie divine. Croire que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu lui-même, c'est la condition première pour être compté parmi ses brebis, pour être agréables à son Père.

Le christianisme n'est autre chose que l'acceptation, dans toutes ses conséquences doctrinales et pratiques les plus lointaines, de la divinité du Christ dans l'Incarnation.

Le règne du Christ et, par lui, la sainteté, s'établit en nous, dans la mesure de la pureté, de la vivacité et de la plénitude de notre foi en Jésus-Christ.

Notre sainteté est l'épanouissement de notre qualité d'enfant de Dieu. Or, c'est par la foi d'abord que nous naissons à cette vie de la grâce qui nous rend enfants de Dieu : « Omnis qui credit quoniam Iesus est Christus ex Deo natus est – Celui-là est né de Dieu qui croit que Jésus est le Christ. »

Nous ne sommes vraiment les enfants de Dieu que si notre vie est basée sur cette foi.

Le Christ, vie de l'âme, pp. 169, 171.


Mercredi de la Passion

Le Christ Jésus affirme sa divinité

Plus d'une fois, nous lisons dans l'Évangile que les Juifs se disputaient entre eux au sujet du Christ.

Un jour, voulant en avoir le cœur net, des Juifs entourent Jésus et lui disent : « Jusques à quand tiendras-tu notre esprit en suspens ? Si tu es le Christ, dis-le-nous franchement. » — Et que répond Notre-Seigneur ? « Je vous l'ai dit, et vous ne me croyez pas ; les œuvres que je fais au nom de mon Père rendent témoignage de moi. » Et il ajoute : « Mais vous ne me croyez pas parce que vous n'êtes pas de mes brebis ; mes brebis entendent ma voix, je les connais et elles me suivent ; je leur donnerai la vie éternelle et elles ne périront jamais, et nul ne me les ravira ; nul ne les ravira de la main de mon Père qui me les a données, car mon Père et moi nous sommes un. »

Alors les Juifs, le prenant pour un blasphémateur parce qu'il se disait l'égal de Dieu, ramassent des pierres pour le lapider. Et comme Jésus leur demande pourquoi ils agissent ainsi : « Nous te lapidons, répondent-ils, à cause de ton blasphème, parce qu'étant homme, tu prétends être Dieu. » — Et quelle est la réponse du Christ Jésus ? Nie-t-il ce qu'on lui reproche ? Non, au contraire ; il le confirme plutôt ; il est bien ce qu'ils pensent : l'égal de Dieu ; ils ont bien compris ses paroles, mais il tient à l'affirmer de nouveau : il est le Fils de Dieu, « puisque, dit-il, je fais les œuvres de mon Père qui m'a envoyé » et que, par la nature divine, « le Père est en moi et moi dans le Père ». Le Père nous donne son Fils pour être notre modèle, notre sanctification, notre vie : « Recevez mon Fils, car en lui vous aurez tout. Et en le recevant, vous me recevez moi-même, vous devenez, par lui, en lui, mes fils bien-aimés. » C'est ce que disait Notre-Seigneur en personne : « Celui qui croit en moi, ce n'est pas à moi que s'arrête sa foi, mais elle remonte jusqu'à mon Père qui m'a envoyé. »

Le Christ, vie de l'âme, pp. 170-171.


Jeudi de la Passion

Pénitence de l'âme et pardon de Dieu

La pénitence est la condition requise pour recevoir et garder en nous le pardon divin.

Voyez Madeleine : elle est, en même temps qu'un des plus magnifiques trophées de la grâce du Christ, le splendide symbole de l'amour pénitent. Que fait-elle ? Elle immole au Christ ce qu'elle a de plus précieux : cette chevelure, qui est son ornement, sa gloire, mais dont elle s'est servie pour séduire les âmes, leur tendre des pièges et les perdre, — elle l'emploie, à quoi faire ? à essuyer les pieds du Sauveur. C'est l'amour pénitent qui s'immole, mais qui, en s'immolant, attire et retient les trésors de la miséricorde : « Remittuntur ei peccata multa quoniam dilexit multum – Ses nombreux péchés lui ont été remis parce qu'elle a beaucoup aimé ».

Madeleine la pécheresse est devenue le triomphe de la grâce de Jésus.

Et n'oublions jamais que nous devons voir en ce que Jésus fait comme homme une révélation de ce qu'il accomplit comme Dieu, avec le Père et leur commun Esprit. Jésus reçoit les pécheurs et leur pardonne : c'est Dieu même, qui, sous une forme humaine, s'incline vers eux et les accueille dans le sein de ses miséricordes éternelles.

Le Christ dans ses mystères, pp. 240, 241, 244.

Pensons aussi à cette parole : « Vous qui avez absous Madeleine et exaucé le bon larron, Vous ne m'avez pas laissé sans espérance. » Le Christ Jésus a pardonné à Madeleine ; mieux que cela, il l'a entourée d'un amour de prédilection.

Ce que le Christ a opéré en Madeleine, il peut le renouveler dans le plus grand des pécheurs ; le Christ peut réhabiliter ce pécheur et le conduire à la sainteté. Œuvre réservée à la toute-puissance divine. Il est Dieu ; et Dieu seul a ce pouvoir de renouveler l'innocence dans sa créature : c'est le triomphe du sang de Jésus.

Le Christ, idéal du moine, p. 227.


Notre-Dame des Sept Douleurs – Eglise de Flanthey (VS)

Vendredi de la Passion : Commémoration des sept douleurs de la Bienheuseuse Vierge Marie

Douleur et foi de la Vierge au Calvaire.

Jamais mère n'a aimé son enfant comme Marie a aimé Jésus ; son cœur de mère a été façonné par l'Esprit-Saint pour aimer un Homme-Dieu. Jamais cœur humain n'a battu plus tendrement que le sien pour Jésus, car elle était pleine de grâce, et son amour ne rencontrait point d'obstacle à son épanouissement.

Puis, elle devait tout à Jésus ; son immaculée conception, les privilèges qui font d'elle une créature unique.

Quelle douleur inexprimable fut la sienne, lorsqu'elle reçut dans ses bras le corps ensanglanté de Jésus !

Jetons-nous à ses pieds pour lui demander pardon des péchés qui furent la cause de tant de souffrances : « Ô Mère, source d'amour, faites-moi comprendre la force de votre douleur, afin que je partage votre affliction ; faites que mon cœur soit embrasé d'amour pour le Christ, mon Dieu, afin que je ne songe qu'à lui plaire ! »

Le Christ dans ses mystères, p. 316.

La foi de la Vierge n'a connu aucune ombre. Tandis qu'au moment de la Passion les Apôtres qui avaient vécu trois années avec Jésus et avaient été chaque jour les témoins de ses miracles, et ceux-là même qui l'avaient contemplé dans les splendeurs du Thabor, l'abandonnèrent, Marie, elle, n'a jamais vacillé un instant : la lumière de sa foi a toujours brillé dans toute sa splendeur.

Elle le voyait sur la croix, pâle, mourant, insulté, raillé, versant jusqu'à la dernière goutte de son sang, et elle croyait.

Elle se tenait devant son Fils dans un état d'adoration, elle le reconnaissait pour son Dieu.

Aussi, dans les ténèbres du Calvaire, elle contenait en elle et représentait seule, au pied de la croix, la foi de toute l'Église.

Obtenez-nous, ô Marie, la grâce insigne d'une foi parfaite, jusque dans la nudité de l’épreuve !

Conférence inédite.


Samedi de la Passion

Fruits de la participation aux souffrances du Christ

Lorsque nous contemplons les souffrances de Jésus, il nous donne, d'après la mesure de notre foi, la grâce de pratiquer les vertus qu'il a manifestées durant ces heures saintes.

Comment cela ?

Quand le Christ vivait sur la terre, « une force toute-puissante émanait de sa personne divine, qui guérissait les corps », éclairait les esprits et vivifiait les âmes.

Il se passe quelque chose d'analogue lorsque nous nous mettons en contact avec Jésus par la foi. À ceux qui, avec amour, le suivaient sur le chemin du Golgotha ou assistaient à son immolation, le Christ a sûrement octroyé des grâces spéciales. Ce pouvoir, il le conserve encore à présent ; et, quand en esprit de foi, pour compatir à ses souffrances et l'imiter, nous le suivons du prétoire au calvaire et nous nous tenons au pied de sa croix, il nous donne ces mêmes grâces, il nous fait part des mêmes faveurs.

N'oublions jamais que le Christ Jésus n'est pas un modèle mort et inerte ; mais, toujours vivant, il produit surnaturellement en ceux qui s'approchent de lui dans les dispositions voulues, la perfection qu'ils contemplent en sa personne.

C'est pourquoi, si, chaque jour, durant quelques instants, suspendant vos travaux, et faisant taire en votre cœur les bruits des créatures, vous accompagnez l'Homme-Dieu sur le chemin du Calvaire, avec foi, humilité et amour, avec le désir véritable d'imiter les vertus qu'il manifeste dans sa passion ; soyez assuré que votre âme recevra des grâces de choix qui la transformeront peu à peu à la ressemblance de Jésus et de Jésus crucifié. Or, n'est-ce pas en cette ressemblance que saint Paul ramène toute la sainteté ?

Le Christ dans ses mystères, pp. 300-301

 

Eglise Notre-Dame du Crann – Spézet